Des centaines de journaux, des milliers de dessins... Depuis 25 ans, Noyau – Yves Nussbaum dans le civil – illustre les films à l’affiche de La Lanterne magique. En Suisse et dans le monde, plus de 30000 enfants s’initient au cinéma à travers les drôles de stars imaginées par Noyau, sa petite souris malicieuse et ses éléphants joyeusement pontifiants. Artiste de renommée internationale, établi à Zurich depuis l’âge de 22 ans, ce Neuchâtelois de Peseux, 55 ans, donne bel et bien son identité au ciné-club le plus populaire de Suisse. Entretien.
Vous souvenez-vous de votre première illustration pour La Lanterne magique?
«La ruée vers l’or», je crois. On ne pensait pas que ça prendrait une telle ampleur, alors, on puisait dans les classiques.
Vingt-cinq ans plus tard, Chaplin ouvre la saison au Locle et Buster Keaton, à Neuchâtel et à La Chaux-de-Fonds... Les recettes du succès sont immuables?
Les films sont très diversifiés, anciens, nouveaux, ils proviennent de tous les pays. Mais La Lanterne et le journal ont aussi un rôle historique pour faire comprendre aux enfants les évolutions du cinéma. Donc, les grands classiques sont toujours représentés, Chaplin, Keaton, Harold Lloyd font partie du patrimoine; en plus, ces films sont fabuleux.
On parle cinéma aux enfants de la même manière qu’il y a 25 ans?
Non, mon approche des films a changé, mes exigences aussi, je suis passé d’un style plutôt minimaliste à des dessins plus fournis. Les priorités de Vincent Adatte (réd: auteur des textes) ont aussi évolué.
Pardon pour la question, mais n’est-ce pas paradoxal d’illustrer des films par le dessin? Ces milliers d’heures de travail...
Vous voulez dire, pourquoi ne pas se contenter des photos de films? C’est une façon de prendre de la distance par rapport à l’œil de la caméra. Avec le dessin, tous les films sont traités de manière égale, les blockbusters, les films en images de synthèse, les très anciennes pellicules un peu floues en noir et blanc; ce qui supprime les a prioris. C’est toute la démarche de La Lanterne, ça! Permettre aux enfants de découvrir les films sans préjugés pour qu’ils développent un regard critique et autonome.
Ça doit être difficile d’illustrer un film que vous n’aimez pas?
Pas forcément. Les films que j’aime m’intimident parfois, je deviens un peu nerveux dans mon interprétation. Je suis plus décontracté, plus insouciant, face à des films plus communs. Mais la qualité d’un dessin dépend de tellement de facteurs, mon humeur, parfois même la météo...
Enfant, vous étiez déjà un mordu de 7e art?
J’ai grandi sans télévision et je vis toujours sans télévision. Alors, c’était un événement d’aller au cinéma. Neuchâtel a toujours été une ville très cinéphile, il y avait un choix assez exceptionnel et plusieurs ciné-clubs. J’allais beaucoup au cinéma et j’y vais encore même si avec l’âge...
Avez-vous parfois des pannes d’inspiration? Voire une certaine lassitude... Même si vous allez me répondre par la négative?
Vous avez raison, dans le dessin, il y a un grand risque d’ennui si on reste dans son système. Mais à La Lanterne, il y a toujours une part d’aventure, il y a toujours des changements dans les générations, dans le cinéma, dans les supports. Avec le numérique, j’ai élargi mon langage, apporté de la couleur, adapté mon dessin au smartphone et au web. Aucun risque d’ennui.
"Les temps modernes" vus par Noyau. A voir au Locle le 12 septembre.
Premières séances
Mercredi 12 septembre:
La Chaux-de-Fonds, cinéma Plaza, 13h30 et 15h30: "Steamboat Bill Junior".
Le Locle, Casino, 14h: «Les Temps modernes».
Neuchâtel, Les Arcades, 13h45 et 15:45: "La Croisière du Navigator".
Mercredi 3 octobre
Couvet, Colisée, 14h30: film connu dix jours avant.
Inscriptions sur www.lanterne-magique.org ou sur place 15 minutes avant le début de la séance.