Cuisine surréaliste à l'ABC

Ici, les ingrédients sont des mots. «Mot froid, mot chaud. Le mot cru, le mot cuit», propose la carte des mets. «Peut-on cuire le mot? Ou est-ce de la langue qu'il convient de préparer et présenter au spectateur?» Au menu, trois «spectacles-séminaires-conférences». Aux fourneaux, le plasticien et auteur dramatique Pascal Nordmann, l'ethnologue, artiste et écrivain Alain Monnier et les comédiens Christiane Margraitner et Philippe Vuilleumier. Des séminaires plutôt loufoques. On passera de la compréhension du mot - pourquoi le mot? qu'est-ce que le mot? - à la phrase - peux-t-on sauver la phrase? - puis, la phrase introduisant la pensée humaine, on tombera dans le drame. «Du drame, nous ne savons rien. Le drame du drame, c'est que les mots du drame mangent le drame.»

Amateur des contrées sauvages et reculées, l'ethnologue Alain Monnier s'est d'abord intéressé aux mythes des ex-cannibales de Nouvelle-Guinée, avant de se mettre le cap sur La Chaux-de-Fonds, où il vit depuis trois ans. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages parmi lesquels «Déluges et autres catastrophes», «Mythes d'Amazonie» ou encore de contes comme «Au-delà du mal et du bien, mémoires d'une jeune missionnaire de l'Institut Phonétique des Quatre Saisons».

Homme de théâtre, Pascal Nordmann mène parallèlement une carrière de plasticien. Il expose à l'ABC une cinquantaine de drôles de machines, rudimentaires et poétiques. «L'esprit des lieux» met en scène des crayons qui écrivent tout seul, des machines animées par d'invisibles écrivains... Une cuisine au goût prononcé pour le rythme, celui de la machine qui noircit le papier, celui de l'écriture, celui de la lecture. Un parfum surréaliste auquel n'aurait pas résisté André Breton. / comm-syb