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«Le Petit Poucet» comme vous ne l'avez jamais entendu...

10 avr. 2008, 12:00

Des gravillons au sol. On rentre dans une boîte. Une conteuse, un grand livre. Des lits superposés comme au camp de ski. Les petits corps se calfeutrent sous les couvertures. On se trouve sur la scène de la grande salle du théâtre du Passage. Monica Demuru s'apprête à lire «Buchettino» ou «Le Petit Poucet» de Charles Perrault. Un moment en apparence tout simple et pourtant... Cette aventure théâtrale unique en son genre, initiée par la Sociètas Raffaello Sanzio, n'en finit pas de séduire l'Europe. Au point où le Passage n'hésite pas à la reprogrammer après une première halte envoûtante en 2003.

Depuis treize ans, la troupe du charismatique Roméo Castelluci, qui sera un des artistes associés du prochain festival d'Avignon, présente ce bijou d'intimité en parallèle avec des productions beaucoup plus expérimentales: «Nous transmettons une fable qui s'ancre dans la réalité la plus logique. La parole joue un rôle fondamental, alors que l'image même cassée est au centre des autres créations de Roméo», explique Monica Demuru, narratrice historique de ce spectacle. Elle aime la sensation de «sonorités fanées» que donne la traduction italienne du texte, qu'elle trouve finalement très proche de l'original.

De Chiara Guidi elle dit «elle est l'âme acoustique de Buchettino». Le son joue en effet un rôle fondamental dans la bulle créée, on perçoit le frémissement de la viande qui grille, la brusquerie du ronflement de l'ogre. La manière dont Monica Demuru adapte sa voix est digne d'un funambule. Enfant intimidé ou créature débonnaire, son visage se modifie de manière drastique en fonction des situations.

Eclairée par une seule ampoule, elle n'effectuera pas de grands déplacements sur le plateau. Cette proposition reste si belle de bout en bout sans jamais donner dans le spectaculaire. Dans n'importe quelle production plus commerciale, des créatures feraient leur apparition. «Les enfants ont besoin d'expériences qui leur font penser à la réalité. Nous poussons l'hypernaturalisme à l'extrême», défend Monica Demuru. Ici tout se terre, tout se fabrique dans le secret. Lorsqu'on ferme les paupières, un monde grouille à l'intérieur de nous, frissons et bonheurs mêlés.

Seul le travail magistral sur le son et la présence physique des bruits remplissent l'espace et le dévastent. Les murs bougent. Bruits métalliques, vent effrayant. Chaque pas des personnages se drape d'une couleur. L'enveloppe qui nous abrite semble vouloir nous lâcher. Nous déverser dans l'ailleurs comme sur un toboggan où on peut lécher les parois recouvertes de confiture, tout en songeant que la langue pourrait se faire confisquer par les virages.

«Une expérience qui bouleverse le petit héros qui devient un homme», ainsi parle la conteuse du «Petit Poucet». Elle ajoute: «Il ressemble plus aux héros grecs qu'aux héros modernes.»

Neuchâtel, théâtre du Passage, encore aujourd?hui à 14 et 17 heures. Il reste quelques places
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