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Pakistan : millionnaire cherche trafic d'antiquités

Le trafic d'antiquités est monnaie courante au Pakistan et permet d'accumuler des milliers de Francs, dans un pays où le salaire moyen est de 100 CHF par jour.

12 août 2012, 09:11
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Quand il s'est retrouvé étranglé par les dettes, il y a 30 ans, le Pakistanais Zaman Khan a un temps songé au suicide. Il a finalement préféré se mettre à déterrer et exporter illégalement des antiquités, un juteux trafic qu'il l'a rendu millionnaire.

Il s'agissait au départ d'une banale querelle familiale. Menacé par des cousins à la suite d'un différend foncier, Zaman avait dû emprunter 1,7 million de roupies (17'600 francs) pour acheter des armes et munitions. Mais bien, vite, ses créanciers ont réclamé leur dû.
 
Déprimé, étranglé par les dettes, il dit avoir été sauvé par l'idée soufflée par un ami. Ce dernier l'emmène dans un site historique de l'ancien royaume du Gandhara, qui régna sur ce qui est aujourd'hui l'est afghan et le nord-ouest pakistanais entre 100 et 1100 après Jésus-Christ.
 
Ils y déterrent 18 pièces de statues anciennes qu'ils revendent aussitôt pour deux millions de roupies.
 
Deux visites sur le même site plus tard, Khan (nom d'emprunt, comme les autres trafiquants interrogés, ndlr) avait assez pour rembourser ses dettes et financer la poursuite de la guerre familiale.
 
Juteux trafic
 
Trente ans plus tard, il est à la tête d'un juteux trafic illégal de trésors archéologiques, notamment gandharas, vers la Thaïlande, l'Europe et l'Amérique.
 
"J'ai gagné des millions de roupies grâce à ce business", explique-t-il, entouré d'une dizaine d'hommes armés dans sa maison de Charsadda, à 130 km de la capitale Islamabad. Une fortune, dans un pays où le salaire mensuel de base tourne autour de 10'000 roupies (un peu plus de 100 francs).
 
10'000 roupies, c'est également ce que donne Zaman aux policiers du coin avant de creuser un site à la recherche d'antiquités. Puis il leur verse "1000 roupies par jour de fouille".
 
Transport par des femmes
 
Il va ensuite vendre ses trouvailles à des agents à Peshawar, la principale ville du nord-ouest. "Ils les revendent suite à des intermédiaires qui les exportent en Thaïlande".
 
Pour faire circuler les marchandises au Pakistan, ils utilisent des femmes, "car la police ne les fouille généralement pas aux postes de contrôle".
 
Un autre trafiquant d'antiquités, Raja Javed, explique être "depuis 20 ans dans ce business" qu'il écoule à Peshawar, en Thaïlande et au Japon. "J'ai vendu des centaines de pièces valant des millions de roupies", explique-t-il dans sa villa située à quelques mètres du musée de Taxila, célèbre site gandhara proche d'Islamabad.
 
Sa propriété d'un demi-hectare comprend des jardins et plusieurs bâtiments, dont le principal est coiffé d'un dôme rappelant ceux que l'on trouve sur les tombes des rois de l'époque mogole (1526-1857) et saints soufis.
 
Loi sévère
 
"J'ai vendu au moins 20 grandes statues de bouddha (entre 40 et 80 kilos, ndlr), chacune pour près de 20'000 dollars", dit-il. Selon lui, le trafic d'antiquités ne devrait pas être considéré comme un crime, et le gouvernement devrait les acheter au prix du marché.
 
La loi pakistanaise interdit en principe la déplacement ou la vente de statues, bijoux, pièces d'or ou autre antiquités, même par les particuliers qui les trouvent chez eux. "Elles sont la propriété du gouvernement", rappelle Mehmoodul Hassan, un cadre du département public d'archéologie.
 
"Tout déplacement ou vente frauduleuse est passible de cinq ans de prison ou d'une amende de 500'000 roupies voire les deux à la fois", ajoute-t-il. Autant d'embûches que l'on peut éviter avec de bonnes relations.
 
Les douanes pakistanaises affirment de leur côté tout faire pour contrecarrer ce trafic selon elles limité à quelques individus. "Tout notre système est informatisé, et les cas de corruption sont rares", assure leur porte-parole, Riffat Qazi.
 
"Je suis un roi"
 
L'un des trafiquants interrogés par l'AFP a rapidement donné le nom de deux Pakistanais possédant une galerie en Thaïlande, et qui peuvent donc aider à y faire passer les antiquités.
 
Dans son ranch fortifié des environs de la capitale, l'un d'eux avoue que le "métier" est devenu plus difficile, mais reste faisable: "Quand je prends l'avion, je mets les antiquités dans mon bagage à main. Avant, on pouvait les mettre en soute, mais tout y est scanné maintenant".
 
"Cela fait quarante ans que je fais ce métier. Et je suis un roi", dit-il.
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