En été 2005, toute la Suisse ne parle que de ça. Un malade s'attaque aux animaux. Il les blesse à coups de couteau, les tue, prélève sexes et tétines sur les cadavres. Les cas se comptent par dizaines, les articles par centaines. L'affaire traverse les frontières: TF1 lui consacre un long reportage: «Terreur sur les pâturages». Un psychiatre l'affirme: «Si on ne l'arrête pas, il pourrait s'attaquer aux humains!» L'angoisse est à son comble. Des patrouilles armées arpentent les pâturages.
A Neuchâtel, Olivier Guéniat prie pour que le sadique - ou, selon certains, une bande - ne vienne pas sévir dans la région. Vain espoir. Le canton entre dans la tourmente. Olivier Guéniat donne un ordre à ses troupes: «Agir comme s'il s'agissait d'un meurtre!»
Dès lors, on photographie, on prélève l'ADN, on s'entoure de spécialistes. Au lieu de chercher le coupable, on envisage d'autres hypothèses. C'est le b.a.-ba de toute enquête. Pourtant, d'éminents policiers ont négligé la méthodologie. C'est qu'ils sont convaincus, à l'instar d'Olivier Guéniat au début, que seul un désaxé a pu infliger ces tourments aux bêtes. Le conditionnement - le même que celui qu'on observe dans les erreurs judiciaires - est tel qu'il empêche de voir des choses évidentes. Dans un cas, par exemple, s'exclame l'orateur, pour tuer l'animal, «le sadique aurait dû être parachuté», tant est retiré l'endroit où a été retrouvé la bête.
Les investigations menées par les Neuchâtelois permettent de découvrir que les animaux sont décédés de mort naturelle ou ont été victimes d'accidents et /ou d'attaques de carnivores. Les coupures ne correspondent en rien à celles faites par un couteau: on a vérifié dans un abattoir.
Ainsi, l'âne découvert à Couvet dans un champ, sans ses oreilles, une plaie énorme entre les pattes arrière, est autopsié. Verdict: arrêt cardiaque. Pourtant, la voyante personnelle de la reine d'Angleterre, qui s'est déplacée - authentique! - a eu une vision: deux hommes en jeans en train de clouer contre une poutre les parties génitales du pauvre animal. Or l'âne était castré!
Emaillée de bons mots - «dans une telle affaire, on ne peut pas interviewer les autres vaches» -, la démonstration d'Olivier Guéniat n'a laissé personne indifférent. Chacun est reparti plus instruit. Et l'esprit critique aiguisé. / LBY