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Un nouveau droit d'asile pour traquer les «abus»

A peine a-t-on mis en vigueur les dernières révisions du droit d'asile et des étrangers (début 2008), qu'on remet déjà ça. «Pour lutter contre les abus», assure le Conseil fédéral. Et pour contrer l'initiative «renvoi» de l'UDC.

15 avr. 2009, 11:15

Après le durcissement général de la loi sur l'asile, en 2007-2008, le Conseil fédéral estime que, pour faire face à «l'afflux des requérants», il faut «accélérer les procédures» et «lutter contre les abus». Les trois arguments sont utilisés à chaque révision depuis 1985. De nouvelles mesures ont donc été mises en consultation, jusqu'au 15 avril. Le Parlement sera ensuite saisi d'un projet définitif.

Le signal était donné avant même l'entrée en vigueur de la dernière révision. En 2005, suivant un arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme, la Commission fédérale de recours en matière d'asile (aujourd'hui intégrée au Tribunal administratif fédéral, TAF) avait admis que les déserteurs de l'armée d'Erythrée méritaient protection: il était établi que ces réfractaires risquaient la torture et des traitements inhumains.

Cette décision avait irrité le conseiller fédéral Christoph Blocher, alors en charge de l'asile. Il y voyait, non pas la confirmation de la jurisprudence suivie, mais une rupture de nature à ouvrir la porte à une sorte d'admission collective de tous les déserteurs. Il a donc préparé les modifications législatives nécessaires, aujourd'hui assumées par Eveline Widmer-Schlumpf, même si elle préfère parler de «clarification» juridique.

Le projet prévoit donc que la désertion n'est pas, en soi, un motif d'asile, même s'il y a des risques réels. Le TAF semble d'ailleurs avoir anticipé: en janvier, à propos d'un réfractaire géorgien, il a estimé que sept ans de prison pour désertion ne sauraient être qualifiés de disproportionnés. Mais le Conseil fédéral admet qu'en cas de risque de persécution, il faudra au moins accorder l'admission provisoire. Difficile de s'y retrouver... Autre mesure prévue dans la révision: la suppression de la possibilité de déposer une demande d'asile dans une ambassade. Le Conseil fédéral relève que la Suisse est le dernier pays européen à prévoir cette procédure, et qu'elle coûte cher. Il veut aussi éviter que la Suisse soit compétente pour traiter les cas de requérants qui déposeraient ensuite une seconde demande dans un autre pays de la Convention de Dublin.

Pour les opposants à cette mesure, on écarte de la procédure d'asile tous ceux qui ne peuvent pas se déplacer (femmes avec enfants, jeunes, personnes âgées, malades, démunis). Parmi les autres points de la révision figurent encore les activités à caractère politique que déploient des requérants dans le seul but de rendre impossible leur renvoi. Cet abus du droit d'asile serait frappé d'une sanction pénale.

Cette disposition est critiquée pour sa sévérité, mais aussi du fait qu'elle revient à interdire l'exercice de droits fondamentaux (liberté d'opinion et d'expression) et qu'il serait difficile de prouver qu'elle est utilisée dans «le seul but» d'échapper au renvoi. A noter que le gouvernement neuchâtelois vient de recommander le rejet des deux projets de révision. /FNU

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