10h07 - Une tentative de coup d'Etat militaire a eu lieu ce matin en Guinée, quelques heures après la mort à 74 ans du président Lansana Conté qui a dirigé le pays d'une main de fer pendant près d'un quart de siècle. Les putschistes semblaient toutefois divisés.
La France a affirmé en milieu de journée que les autorités légitimes paraissaient contrôler la situation à Conakry et dans le reste du pays, premier exportateur mondial de bauxite.
Un officier de l'armée guinéenne, le capitaine Moussa David Camara, avait annoncé dans la matinée à la radio d'Etat la dissolution du gouvernement et la suspension de la constitution.
Il a fait état de la création d'un Conseil national pour la démocratie et le développement (CNDD) chargé d'assurer l'intérim du pouvoir et de nommer dans les prochains jours un président et un gouvernement.
La diffusion de ce texte a créé la confusion à Conakry après l'annonce dans la nuit de la mort de Conté. Des militaires et des policiers étaient postés autour du palais présidentiel ainsi que de la banque centrale, selon des témoins.
Les putschistes semblaient contrôler le principal camp militaire du pays, à Conakry, situé près de l'aéroport international et abritant des troupes d'élite. Aucune violence n'a été signalée dans le pays depuis le décès présidentiel et la tentative de coup d'Etat.
Désaccord sur le chef
Les deux principaux responsables politiques du pays ont refusé de reconnaître le coup de force des putschistes. Le président de l'Assemblée nationale, Aboubacar Somparé, a assuré qu'une «minorité de soldats et d'officiers» était impliquée et que «la grande majorité est encore loyaliste».
Le gouvernement «n'est pas dissous», a renchéri le Premier ministre Ahmed Tidiane Souaré. «Je suis sûr qu'ils reviendront à la raison. Ils n'ont pas utilisé la force. Il n'y a de menace contre personne», a-t-il assuré.
Les putschistes n'ont pas réussi à se mettre d'accord sur la personne devant diriger la junte mise en place, ont affirmé des militaires loyalistes. Le lieutenant-colonel Sekouba Konaté, commandant de la principale unité d'élite de l'armée, n'a semble-t- il pas fait l'unanimité.
Soigné en Suisse
Porte-parole des putschistes, le capitaine Moussa Dadis Camara a invoqué notamment «la corruption généralisée», l'impunité et l'anarchie ainsi qu'une «situation économique catastrophique» pour justifier la dissolution du gouvernement.
Le président Lansana Conté, qui vivait le plus souvent reclus ces dernières années, souffrait notamment de diabète. Il s'était rendu à de nombreuses reprises à l'étranger depuis 2002 pour des traitements médicaux, que ce soit au Maroc, à Cuba ou en Suisse.
Conté était arrivé au pouvoir en 1984 à la faveur d'un coup d'Etat militaire, peu après la mort du «père de l'indépendance» Ahmed Sekou Touré. Il s'était toujours appuyé sur l'armée pour se maintenir au pouvoir mais des divisions entre les officiers et la troupe étaient récemment apparues.
Elections dans 60 jours
La constitution prévoit l'organisation d'une élection présidentielle dans un délai de 60 jours pour trouver un successeur à Conté, qui n'a jamais clairement désigné de «dauphin».
L'Union africaine (UA) a exprimé son inquiétude: «nous appelons toutes les forces politiques de Guinée et autres institutions de l'Etat, notamment les forces armées, à assurer une transition constitutionnelle, pacifique et consensuelle, dans le respect de l'ordre démocratique», a déclaré le commissaire à la Paix et la sécurité de l'UA, Ramtane Lamamra.
La Maison Blanche et l'Union européenne ont également appelé à une «transition pacifique et démocratique». /ats
Article mis à jour à 16h57 et 18h33