Les deux Suisses suspectés de contrebande nucléaire, Urs et Marco Tinner, veulent déposer plainte auprès de la Cour européenne des droits de l'homme, à Strasbourg. Ils jugent excessive leur détention préventive sans inculpation.
Les deux frères se trouvent en détention préventive depuis presque quatre ans, ce qui est contraire au principe de célérité, a indiqué hier l'avocat d'Urs Tinner, Roman Bögli.
D'autre part, la destruction de documents ordonnée par le Conseil fédéral porte une grave atteinte aux droits de la défense, affirme l'avocat. En effet, des informations susceptibles de disculper son client et son frère ont été effacées. Roman Bögli espère porter le dossier devant la Cour de Strasbourg dans les prochains mois. L'avocat de Marco Tinner compte en faire autant. Les deux avocats avaient déjà tenté de faire libérer leurs clients en faisant appel au Tribunal fédéral, en vain. La haute instance helvétique avait refusé leur libération en août dernier, estimant que leur détention n'était pas excessive au vu de la peine encourue.
Le Ministère public de la Confédération suspecte les frères Tinner, ainsi que leur père Friedrich, d'avoir travaillé pour Abdul Qadeer Khan, le père de la bombe atomique pakistanaise, qui aurait développé un programme secret d'armement nucléaire pour le compte de la Libye.
Les trois ingénieurs sont accusés d'avoir aidé Tripoli à développer des centrifugeuses à gaz destinées à l'enrichissement de l'uranium entre 2001 et 2003. L'affaire a été mise au jour en 2004 après que la Libye eut abandonné son programme nucléaire. Les frères Tinner auraient contribué à ce changement en informant la CIA. Les deux frères et leur père avaient été arrêtés en octobre 2004 en Allemagne, puis extradés vers la Suisse en mai 2005. Le père avait été remis en liberté début 2006.
Les avocats des ingénieurs confirment la collaboration avec les services de renseignement américains et avec Abdul Qadeer Khan. Il y a eu des livraisons, ont-ils affirmé hier. Toutefois, les Tinner ne savaient pas où ces livraisons partaient, ont-ils expliqué . /ats