Le bilan s'alourdit à Bangkok, deux morts et plus de 100 blessés

13 avr. 2009, 18:14

Aujourd'hui, L'armée thaïlandaise est intervenue massivement à Bangkok contre les manifestants qui réclament la démission du premier ministre Abhisit Vejjajiva. De violents affrontements se sont poursuivis toute la journée dans le centre-ville. Bilan: deux morts et plus de 100 blessés.

Un homme de 54 ans a été tué par balle dans des heurts entre les  manifestants et des habitants de la capitale, a déclaré à la télévision Satit Wongnongtaey, un collaborateur du chef du gouvernement. Il aurait été abattu par des "chemises rouges", du surnom des partisans de l'ex-premier ministre en exil Thaksin Shinawatra, selon les proches de la victime.

Un responsable de l'hôpital Sua Chiew a pour sa part indiqué qu'un homme de 19 ans avait également été tué après avoir été atteint par balle à l'abdomen, et cinq autres blessés au cours des mêmes affrontements.

Multiples barrages
A la tombée de la nuit, les soldats, apparemment décidés à en finir, ont fait mouvement dans la zone occupée depuis près de trois semaines par les "chemises rouges" de l'opposition près de Government House, le siège du gouvernement. Des tirs ont été entendus alors que les militaires franchissaient les barrages érigés par les manifestants, partisans de Thaksin, qui vit en exil.

Les "chemises rouges" campent autour de Government House depuis le 26 mars. Le premier ministre actuel, qui a décrété dimanche l'état d'urgence dans la capitale, est apparu à la télévision pour les inviter à quitter les lieux en leur garantissant le libre passage.

Les forces de l'ordre ont à leur tour établi des barrages dans le quartier pour empêcher le retour des manifestants qu'ils ont réussi à déloger. Un peu plus loin, les "chemises rouges" ont mis le feu à des bus et à un bâtiment public. Une colonne d'épaisse fumée noire s'élevait au-dessus du centre-ville.

De son exil, l'ancien premier ministre Thaksin a fait état sur CNN de la mort de plusieurs manifestants. "Beaucoup de gens meurent (...) Les corps sont emmenés dans des camions", a-t-il affirmé. Les services médicaux ont eux recensé au moins 101 blessés, dont quatre atteints par balle. Vingt-quatre étaient toujours hospitalisés dans la soirée.

"Revolution du peuple"
Les heurts avaient commencé avant l'aube, quand l'armée avait chargé en tirant en l'air plusieurs centaines de manifestants qui bloquaient un carrefour stratégique de Bangkok, Din Daeng. La foule avait riposté par des jets de cocktails Molotov.

Les manifestants ont attaqué hier le siège du ministère de l'Intérieur et la voiture du premier ministre. La veille, ils avaient contraint les autorités à annuler un Sommet de seize Etats d'Asie et d'Océanie à Pattaya, une cité balnéaire située au sud de Bangkok, en envahissant le lieu de la réunion. Plusieurs dirigeants avaient dû être évacués par hélicoptère.

Thaksin Shinawatra, qui est resté en contact téléphonique avec ses partisans, a déclaré que le moment était idéal pour se soulever contre le gouvernement. Il a réitéré ses appels à une "révolution du peuple", ajoutant qu'il se tenait prêt à revenir en Thaïlande pour conduire le peuple contre un éventuel coup d'Etat.

Dix-huit putschs
La Thaïlande a connu dix-huit coups d'Etat depuis 1932. Le pays ne parvient pas à sortir d'une spirale de violence depuis plusieurs mois, avec d'un côté les royalistes, l'armée et la bourgeoisie urbaine, de l'autre une population rurale qui regrette Thaksin Shinawatra, renversé par un pustch en 2006, et sa politique populiste.

A la fin de l'an dernier, les amis politiques de Thaksin Shinawatra étaient au pouvoir. Mais les manifestations incessantes des "chemises jaunes" royalistes, qui avaient occupé et bloqué les deux grands aéroports de Bangkok, avaient conduit au renversement du gouvernement.

Pour les "chemises rouges", le premier ministre en place Abhisit Vejjajiva n'est arrivé au pouvoir en décembre qu'à la faveur de manoeuvres et de défections au Parlement, orchestrées par l'armée. /ats