Les ministres de l'Intérieur des Vingt-sept ont donné hier leur feu vert définitif à l'intégration de la Suisse dans l'espace Schengen. Elle débutera, le 12 décembre, par la suppression des contrôles d'identité systématique sur les personnes aux frontières terrestres qui séparent la Suisse de ses voisins de l'UE. Mais elle risque de tourner court au cas où le non l'emporterait à l'issue du référendum sur la libre circulation des personnes, qui aura lieu le 8 février 2009.
La Française Michèle Alliot-Marie, dont le pays exerce actuellement la présidence tournante de l'UE, était «particulièrement heureuse» hier. La conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf aussi, car elle a vécu à Bruxelles «une journée un peu spéciale pour la Suisse, dans un sens positif».
Sans discussion, les ministres de l'Intérieur des Vingt-sept ont en effet «conclu que les conditions étaient désormais remplies» pour que soient abolis le 12 décembre les contrôles systématiques sur les personnes aux frontières terrestres qui séparent la Suisse des autres pays de l'espace Schengen.
La Suisse «a travaillé intensivement pendant toute l'année» pour obtenir ce résultat, a souligné Eveline Widmer-Schlumpf. Elle a notamment dû se soumettre à des «visites d'évaluation» d'experts européens, consacrées à la protection des données, à la coopération policière, à sa faculté d'être connectée au système d'information Schengen.
La Suisse a réussi son examen de passage, du moins en ce qui concerne les aspects terrestres de son intégration dans Schengen. En revanche, les aéroports helvétiques n'ont pas encore été mis aux normes européennes. Ils devront prévoir une séparation physique entre les passagers circulant au sein de l'espace Schengen, dont l'identité ne sera plus contrôlée, et les autres. Dans ce contexte, l'UE effectuera de nouvelles inspections début 2009. Si elles se déroulent bien, l'accord sur Schengen sera étendu aux frontières aériennes le 29 mars.
Tout risque cependant d'être remis en cause si, dans l'intervalle, le peuple helvétique devait rejeter le renouvellement et /ou l'extension à la Bulgarie et à la Roumanie de l'accord bilatéral sur la libre circulation des personnes, le 8 février.
«Il est bien évident que si la votation aboutissait à ce que la Confédération suisse ne puisse plus appliquer la libre circulation des personnes, cela poserait un problème majeur et conduirait probablement à interrompre sa participation à Schengen», a déclaré le commissaire européen aux affaires intérieures et judiciaires, Jacques Barrot. «Mais je fais confiance au peuple suisse», a-t-il ajouté.
L'expulsion de la Suisse serait d'autant plus regrettable que son association à Schengen est déjà «un succès», a souligné Eveline Widmer-Schlumpf. En vue de son intégration dans le dispositif Schengen, la Suisse a été reliée dès le 14 août au SIS, cette banque de données européenne qui contient des millions d'informations sur des personnes recherchées ou des objets volés. En trois mois, cela lui a permis d'arrêter, à des fins d'extradition, 21 criminels qui étaient recherchés dans l'UE. Inversement, six personnes activement recherchées en Suisse ont pu être appréhendées dans l'UE. D'autres problèmes sont prévisibles, au cas où la Suisse n'adapterait pas sa législation à certains développements de la législation européenne - l'UE en effet décider de résilier l'accord, qui est évolutif.
Dans ce contexte, les Suisses n'auront pas intérêt à s'opposer à la révision de la loi sur les documents d'identité, soumise à votation le 17 mai 2009, alors que l'UE a donné jusqu'au 1er mars 2010 à Berne pour introduire des données biométriques dans les passeports et les documents de voyage délivrés par les autorités suisses. /TVE