La nomination d'une personnalité hors du sérail diplomatique a toujours suscité des grincements de dents. Lorsque Flavio Cotti avait promu cette pratique, cela avait suscité des vagues au sein du DFAE.
Dans le cas de Carla Del Ponte, l'affaire est d'autant plus intéressante que la Tessinoise est très controversée. Son action à la tête du Ministère public de la Confédération présente un bilan plutôt contrasté. L'enquête contre la société tessinoise Mabetex, accusée d'avoir graissé la patte de l'entourage de Boris Eltsine, s'est achevée sur un flop. L'affaire du colonel Friederich Nyffenegger, dépeint en supercriminel, a débouché sur un acte d'accusation d'une indicible légèreté par rapport aux présomptions initiales. En fait, en acceptant Carla Del Ponte dans son écurie, Micheline Calmy-Rey tire une épine du pied de Christoph Blocher. Lorsque l'ancienne procureure de la Confédération a été désignée en 1999 pour succéder à la canadienne Louise Arbour au TPIY, le DFJP s'était engagé à «lui trouver un poste équivalent» lorsque son mandat prendrait fin.
Des variantes ont été discutées entre Christoph Blocher et Carla Del Ponte. Celle-ci avait indiqué, dans une interview qu'elle a donnée en juillet au «SonntagsBlick», que le chef du DFJP lui aurait même offert son ancien job à la tête du Ministère public de la Confédération.
Au sein du Département fédéral de justice et police, on laisse cependant entendre qu'il s'agit là d'une interprétation très personnelle de ces entretiens. Et au regard des efforts consentis par Christoph Blocher pour reprendre en main le Ministère public, il paraît peu crédible qu'il ait envisagé de le confier à nouveau à quelqu'un qui passe pour avoir contribué à sa réputation sulfureuse. / ERE