Vaud pourrait devenir le premier canton à se doter d'une loi sur l'assistance au suicide. Les citoyens en décideront le 17 juin. Ils se prononceront sur une initiative d'Exit et sur un contre-projet qui fixe un cadre légal au suicide assisté dans les EMS et les hôpitaux.
Jusqu'ici, seuls les Zurichois ont voté sur l'aide au suicide: en mai 2011, ils ont très nettement rejeté deux initiatives visant l'une à restreindre et l'autre à interdire les suicides assistés. En cas de oui à l'un ou l'autre objet, les Vaudois feraient oeuvre de pionniers, aucun autre canton n'ayant encore de loi en la matière.
Même si elle ne concerne que les établissements de soin, cette loi cantonale est d'autant importante que le Conseil fédéral a renoncé à légiférer, enterrant en juin dernier son projet controversé de norme pénale sur le suicide assisté. Le gouvernement entend plutôt soutenir la prévention du suicide et les soins palliatifs.
Initiative d'Exit
Dans le canton de Vaud, où vivent près de la moitié des 16'500 membres annoncés par Exit suisse romande, l'Association pour le droit de mourir dans la dignité a déposé en 2009 une initiative pourvue de 14'000 signatures. Ce texte obligerait les établissements médico-sociaux (EMS) subventionnés à accepter des suicides assistés entre leurs murs.
Le droit à l'autodétermination doit être garanti pour les résidents des EMS comme pour les personnes qui vivent chez elles, explique le président de l'association, Jérôme Sobel. Actuellement, les personnes en EMS qui souhaitent recourir à Exit dépendent du bon vouloir du personnel soignant.
Contre-projet
Les autorités vaudoises ont choisi d'opposer un contre-projet à l'initiative, jugeant que cadrer l'assistance au suicide valait mieux que de s'y opposer. Le texte rédigé par les services de Pierre-Yves Maillard a été approuvé à une très large majorité par le Grand Conseil. Il fixe les conditions d'une aide au suicide dans les EMS reconnus d'intérêt public, mais aussi dans les hôpitaux.
Cette version est soutenue par l'Association vaudoise des EMS (AVDEMS) et la Société vaudoise de médecine (SVM). Tous les groupes politiques recommandent également de voter oui au contre-projet. Les Verts et A gauche toute prônent le oui également pour l'initiative, comme "signe clair en faveur du droit de mourir". Certains catholiques et évangéliques rejettent les deux textes.
Conditions strictes
Le contre-projet fixe deux conditions de base: la personne qui demande l'assistance au suicide doit souffrir d'une maladie grave incurable et elle doit être capable de discernement. Le médecin responsable de l'EMS ou le chef de clinique sera chargé de s'assurer que ces deux critères sont remplis, "en concertation avec l'équipe soignante et le médecin traitant".
Autre condition: des soins palliatifs doivent avoir été proposés et discutés avec le patient. Ni le personnel de l'établissement, ni le médecin responsable impliqués ne peuvent participer à l'acte.
"Pire que le statu quo"
Pour Exit, le contre-projet est pire que le statu quo. Laisser la décision finale au médecin de l'institution constitue une "mise sous tutelle" du patient, dénonce le Dr Sobel. Il critique aussi le fait qu'une même solution soit appliquée aux EMS et aux hôpitaux.
Le processus d'évaluation de la demande déjà mis en place au CHUV est lent et chicanier, explique Exit. "Tout est fait pour décourager la demande. En six ans, une seule a abouti", souligne Jérôme Sobel. "Ce système est une perte de temps, il vaut mieux que les personnes qui demandent notre aide rentrent chez elles". Or, la plupart des résidents en EMS n'ont pas d'autre domicile.
L'EMS représente plus qu'un simple domicile privé, c'est un lieu de vie communautaire et de soins, rétorque le Conseil d'Etat dans son exposé des motifs. Des cautèles sont nécessaires pour protéger non seulement la personne qui souhaite mettre fin à ses jours, mais aussi les autres résidents et les soignants, souligne-t-il également.