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L'expert suisse dénonce des procédés «humiliants»

Intervention peu appropriée avec des moyens excessifs, menottage humiliant, appels des autorités fédérales à agir avec tact négligés: dans son rapport, le membre suisse de la commission chargée d'enquêter sur l'affaire Kadhafi critique la police et la justice genevoises.

31 déc. 2008, 11:09

Le week-end dernier, pour la première fois, le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) a admis que l'intervention aurait pu revêtir des formes plus «nuancées». Il venait de prendre connaissance du rapport du professeur Lucius Caflisch, coprésident de la commission indépendante ad hoc chargée de faire la lumière sur l'arrestation du fils du président libyen et de son épouse en juillet à Genève.

Daté du 14 décembre, ce document de sept pages, dont l'ATS a obtenu copie, conclut qu'aucun acte illégal ne peut être imputé aux forces de l'ordre genevoises. Mais il égratigne durement la police et la justice sur plusieurs points.

Ainsi, eu égard à la position des personnes concernées, le DFAE avait recommandé aux autorités cantonales d'agir avec précaution et ménagement. «A de nombreux égards, il n'a pas été tenu compte de cet avis», écrit le spécialiste du droit international. Au lieu d'émettre un mandat d'amener et d'arrêter le couple Kadhafi, le commissaire de police aurait pu se contenter d'un mandat de comparution leur ordonnant de se rendre au poste. Même si le mandat émis par la police ne contrevenait pas au droit suisse, «une forme de mandat plus légère aurait pu être plus appropriée, considérant le statut spécial de M. et Mme Kadhafi.»

La police a planifié son intervention, mais l'expert suisse s'interroge sur son degré de préparation: «Il a été dit que la police était informée, ou aurait dû l'être, de la présence de l'enfant (ndlr: l'enfant de 3 ans du couple). Le fait est qu'elle ne l'était pas». Une certaine confusion a régné au moment de confier cet enfant à un tiers. Une connaissance du couple l'a finalement pris en charge.

Quant au déploiement de 20 policiers pour arrêter deux personnes, «avec le recul, il peut être considéré comme inutile et excessif, étant donné que le couple n'a pas opposé de résistance». Le professeur relève cependant qu'une délégation de policiers a vainement cherché pendant une heure et demie à entrer en contact avec les Kadhafi avant de se résoudre à déclencher l'intervention.

Concernant le menottage d'Hannibal Kadhafi, alors que celui-ci n'a pas résisté activement, Lucius Caflisch le considère comme «inutile, inapproprié et surtout humiliant». Le fait de ne pas avoir laissé les Kadhafi entrer en contact avec leur consulat tout de suite après leur arrestation ne contrevient pas à la convention de Vienne mais il est décrit comme «discourtois».

Un dernier reproche concerne des faits antérieurs au 15 juillet, jour de l'interpellation. Le 13, soit un jour après le dépôt d'une plainte par les deux domestiques contre le couple, les Kadhafi ont signalé le vol de 2000 euros et d'une montre déposés dans le coffre de la chambre d'Aline Kadhafi. «La police a négligé d'instruire cette affaire avec la rigueur requise par la loi.» Le professeur n'en conteste pas moins plusieurs reproches formulés par la Libye. Le transport d'Hannibal Kadhafi à bord d'un véhicule blindé ne visait pas à le faire passer pour dangereux ou à l'humilier. «Cela dénotait plutôt l'intention de le traiter comme un VIP.» Il n'a à aucun moment été gardé en détention préventive sans mandat en bonne et due forme.

Dans ses conclusions, l'expert suisse souligne que l'arrestation et la détention du couple n'ont pas violé le droit suisse et international, excepté concernant la plainte pour vol qui aurait dû être instruite.  /MCU-ats

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