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Des coupes moins sévères

Le Conseil fédéral réduit les économies prévues dans sa 6e révision. Son projet risque malgré tout d'être attaqué par référendum.

14 mai 2011, 12:32

Le consensus est décidément un art difficile. Et ingrat. Didier Burkhalter en fait l'amer apprentissage. Bien que le Conseil fédéral ait revu à la baisse les mesures d'économies initialement prévues, le deuxième volet de la 6e révision de l'assurance invalidité (AI) présenté hier à Berne par son ministre des Affaires sociales est déjà attaqué de toutes parts.

Par la gauche, les syndicats et les organisations de défense de handicapés, qui l'assimilent à un démantèlement de l'AI. Par la droite, qui ne comprend pas pourquoi le gouvernement a fait passer l'objectif d'économies de 800 à 325 millions par an entre 2015 et 2025. «Il y aura des discussions difficiles sous la Coupole et dans la population», reconnaît lucidement Didier Burkhalter. Un référendum paraît même probable si la réforme passe la rampe du Parlement.

A vrai dire, cette 6e révision de l'AI avait déjà été passablement chahutée lors de la procédure de consultation. Le Conseil en a tiré les leçons en édulcorant son projet. Il a pu le faire aussi parce l'horizon s'est un peu éclairci pour l'assurance invalidité.

D'abord, les précédentes révisions ont permis des économies supérieures aux attentes: le nombre de rentiers AI qui ont pu être réinsérés sur le marché du travail a crû de deux tiers entre 2007 et 2010, et le nombre de nouvelles rentes a diminué de près de 50%. Ensuite, l'AI pourra compter sur des recettes supplémentaires à hauteur de 14 à 15 milliards de francs d'ici à fin 2017, à la faveur de la hausse temporaire de la TVA acceptée en 2009 en votation populaire. A ce rythme, estime Didier Burkhalter, l'assurance pourrait avoir épongé sa dette en 2025, au lieu de 2028.

Avenir moins sombre, coupes moins claires: le Conseil fédéral a donc atténué l'ampleur des sacrifices exigés. Selon ses calculs, ce sont désormais 10% des rentiers AI qui verront leurs revenus diminuer, contre 40% dans son premier projet. Berne maintient toutefois son idée de remplacer le système actuel de rentes par paliers (quart de rente, demi-rente, trois quarts de rente, rente complète) par une rente linéaire. Traduction: une personne reconnue invalide à 65% touchera 65% du montant de la rente AI complète. Pour obtenir une rente complète, il faudra attester d'un handicap à 80% (contre 70% aujourd'hui). Les droits des rentiers de 55 ans et plus resteront acquis.

Pas obligés d'embaucher des handicapés

Malgré tout, 26 000 personnes invalides entre 60 à 79% verront leur rente baisser, surtout des malades psychiques. Didier Burkhalter n'en défend pas moins le changement: «Les effets de seuil actuels pouvaient décourager des gens à travailler.» Or, le ministre croit à leurs chances de réinsertion. «Une prise de conscience est en cours, nous souhaitons qu'elle se développe au sein des entreprises privées, mais aussi publiques», appelle le libéral-radical. Pas question pour autant d'obliger les employeurs à embaucher des handicapés. «La contrainte n'est pas dans la ligne du Conseil fédéral.» Pour le Parti socialiste, néanmoins, «les milieux économiques doivent être rappelés à leurs responsabilités». La gauche et les syndicats mettent en doutent la nécessité de couper dans les rentes, et regrettent que le Conseil fédéral n'ait pas envisagé de nouvelles recettes. «Il prive ainsi de leurs ressources des milliers d'assurés et provoque un transfert de charges massif sur les ménages privés, les prestations complémentaires et l'aide sociale», enchérit Agile, qui regroupe les organisations de défense des handicapés et menace de lancer le référendum.

De son côté, le PDC juge «intolérable» la diminution des rentes complémentaires aux personnes ayant à charge des enfants jusqu'à 18 ans. A droite, les libéraux-radicaux réclament que «les économies prévues de 800 millions soient maintenues». Quant à l'UDC, elle reproche à Didier Burkhalter de trahir la parole donnée au peuple et prédit que la hausse de la TVA pour renflouer l'AI, de temporaire, deviendra permanente dès 2018.

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