Coup de tonnerre hier dans le ciel de la planification hospitalière: après avoir consulté ses membres, l'association des hôpitaux H+ a annoncé qu'elle ne voulait pas de l'accord négocié avec les assureurs sur les modalités d'application du nouveau système de financement hospitalier. Cette décision ne remet pas en cause l'introduction du système de forfaits par cas voulu par le Conseil fédéral et le Parlement, mais elle complique singulièrement la donne. Les délais pourront-ils encore être respectés? «Absolument», répond le porte-parole du Département fédéral de l'intérieur Jean-Marc Crevoisier. «La réforme entrera en vigueur le 1er janvier 2012 comme prévu. Nous avons donné la chance aux partenaires de la santé de trouver un terrain d'entente. Si l'un d'entre eux freine le mouvement, la Confédération y pourvoira. La question sera réglée par voie d'ordonnance».
La facturation
Compte tenu du financement hospitalier approuvé par les Chambres, les hôpitaux devront à l'avenir facturer leurs traitements sur la base de forfaits par cas. Cela signifie que chaque séjour hospitalier doit être classé dans un groupe de pathologie en fonction de la sévérité du cas. La facturation dépend de ce groupe de pathologie, ainsi que des prix de base de chaque hôpital. Ce système doit permettre d'agir sur les coûts en rendant les comparaisons possibles.
Les négociations relatives à l'établissement des forfaits ne sont pas encore terminées. Par contre, en juillet dernier, H+ et santésuisse avaient conclu un compromis sur les modalités d'introduction de ce nouveau système. Il portait sur quatre points: la transmission des données médicales, l'indemnisation des investissements, la surveillance des coûts et la présentation des comptes. Invités à se prononcer par oui ou par non jusqu'au 15 août, les trois quarts des membres de H+ ont refusé ce paquet.
La protection des données
Malgré l'absence de motivation du vote, on sait que la protection des données était l'un des principaux points de friction. Tant les médecins que les organisations de patients craignaient une utilisation commerciale des données transmises, au profit des assurances complémentaires. «C'est un instrument de sélection des risques car les assureurs auraient des informations supplémentaires sur l'état de santé des patients», note le socialiste valaisan Stéphane Rossini, membre de la commission de santé publique du Conseil national. «C'est un faux problème», rétorque la porte-parole de santésuisse Françoise Tschanz. «Nous ne remettons pas en cause le secret médical, mais la transmission des données est indispensable pour que les assureurs puissent effectuer le contrôle des factures prévu par la loi. Si on ne peut pas vérifier que les factures correspondent aux prestations assurées, on prend le risque que des prestations non fournies soient facturées».
Pour Charles Favre, président de l'association H+, le rejet de l'accord revient à rétablir le statu quo. «Chaque hôpital devrait pouvoir continuer comme par le passé à discuter avec les caisses au niveau cantonal», affirme-t-il. Mais c'est justement cette approche qui est condamnée par la réforme. Didier Burkhalter aurait certes préféré une solution négociée entre les partenaires de la santé, mais il veut une réglementation valable sur le plan national.
La marge de manuvre est étroite. S'il se contente de reprendre dans l'ordonnance les éléments négociés par H+ et santésuisse, le conseiller fédéral sera accusé de faire le jeu des assureurs.