En décembre, dans le géant de Val d'Isère, il avait levé un doigt. A Wengen hier, il a levé une main... Question exubérance dans la victoire, on a connu mieux. Cela dit, Carlo Janka commence à se lâcher: le super-combiné du Lauberhorn fait fondre Iceman. «A Val d'Isère, personne ne m'attendait et il fallait que je confirme, se fend-il d'un large sourire. Cela dit, jamais je n'aurais imaginé le faire dans cette discipline, je suis très surpris.» Le Grison de 22 ans a le triomphe calme. Aucun cri, pas de débordements, ni de mot plus haut que l'autre. «Ne pas extérioriser mes sentiments est quelque chose d'inné. C'est comme ça chez moi», avance-t-il, comme pour s'excuser.
Le skieur d'Obersaxen n'est pas du genre hâbleur. L'esbroufe et la frime, très peu pour lui. Lui? Un coureur atypique, un talent fou que le monde découvre avec des yeux de Chimène. «J'en fais un candidat pour le général de la Coupe du monde», n'hésite d'ailleurs pas à commenter Aksel Lund Svindal.
Pour l'heure, Carlo Janka a des ambitions plus mesurées. L'appétit ne vient-il pourtant pas en mangeant? «Gagner le super-combiné de Wengen n'était pas un rêve en soi, assure-t-il de sa voix caverneuse. Moi, mon rêve, c'est de gagner une descente de Coupe du monde.»
La plus haute marche en descente n'a rien d'une utopie. Deuxième en novembre à Lake Louise, le bougre en a les moyens. Hier matin, sur une piste certes raccourcie mais qui comprenait tout de même la Hundschopf, le Brüggli-S et le S-d'arrivée, n'a-t-il pas relégué Didier Cuche (5e), Bode Miller (6e) et Michael Walchhofer (7e) à plus d'une demi-seconde?
Si l'on sait encore que le jeune homme ne skiait que pour la troisième fois de sa vie sur le Lauberhorn après les entraînements de mercredi et jeudi, l'exploit prend plus de valeur encore. «Le géant reste ma spécialité, mais mon objectif est de m'améliorer dans les disciplines de vitesse», précise-t-il, avant de revenir sur sa descente du matin: «J'avais vu aux entraînements que je pouvais aller vite. Je suis très fier d'avoir battu Cuche...»
Carlo Janka a également bluffé tout son monde l'après-midi, bouclant son slalom au 10e rang. Ce n'est pourtant pas le nombre de portes passées pendant l'hiver qui l'ont étouffé... «Je me suis entraîné durant l'automne avec Berthod, Gini et Albrecht. Sinon, je n'ai plus fait de slalom avant lundi et mardi derniers», explique Iceman.
Comme on pouvait s'y attendre, sa performance sur le virage court n'éveille pas sa fibre de l'enthousiasme. «J'étais tranquille avant le départ, car je n'avais rien à perdre, glisse-t-il. Je n'ai pas beaucoup de pratique, mais ça s'est bien passé.»
Sur le circuit depuis trois saisons, Carlo Janka progresse à la vitesse de la lumière. Avec deux victoires et quatre top-10 en géant, super-combiné et descente, il se profile comme un skieur complet. Cinquième et meilleur Suisse du classement général de la Coupe du monde devant Albrecht, jusqu'où ira-t-il? «Je ne me fixe pas d'objectifs comptables, commentait-il après sa victoire à Val d'Isère. Les résultats, je les prendrai comme ils viendront. Par contre, je ne vous le cache pas: j'ai d'immenses espoirs pour l'avenir.»
Et si Janka remettait ça aujourd'hui déjà dans la descente? /PAD
VIDÉO:
Didier Cuche semble avoir trouvé ses marques sur la piste de Wengen. Le
skieur des Bugnenets, premier de l'entraînement mercredi, a pris ce
vendredi matin la 5e place de la descente du super-combiné. Il n'a pas
pris le départ du slalom cet après-midi. L'épreuve a été remporté par
le Suisse Carlo Janka qui signe ainsi sa deuxième victoire de la saison
et de sa carrière. /lb