Que reste-t-il du fameux esprit de Strasbourg? Quelque chose de fort. Cela a représenté un changement et celui-ci perdure. Même si au c?ur de l'hiver on a eu quelques inquiétudes. Maintenant, il y a de plus en plus de coureurs et davantage de managers qui rêvent d'un autre sport. On pointe le cyclisme du doigt, mais nous ne sommes pas radicalement différents des autres disciplines sportives.
Cela ne vous dérange-t-il pas de ne toujours pas avoir de vainqueur du Tour 2006? Non. Moi, j'ai été rassuré quand l'Agence française de lutte contre le dopage, son homologue américaine et les avocats de Floyd Landis ont passé un accord pour que ce coureur ne soit pas au départ du Tour cette année. Pour nous, c'était le plus important. Nous sommes convaincus, depuis le résultat positif de la contre-analyse de son échantillon B, que Floyd Landis ne peut pas être le vainqueur du Tour 2006.
La première place du palmarès 2006 restera donc en blanc... Cette décision finale ne nous appartient pas, elle est du ressort de l'UCI. Mais nous ne pouvons pas l'inclure dans notre palmarès. Maintenant, je comprends très bien que la procédure concernant ce cas de dopage puisse paraître extrêmement longue. Mais nous ne pouvons pas aller plus vite que la justice. Une accélération subite avant le Tour de France serait choquante. En attendant, nous partons sans numéro 1.
Comment garantir que le Tour 2007 sera plus propre que les autres? On peut se poser cette question pour tous les sports. Simplement, la machine médiatique s'est emballée autour du vélo et du Tour de France. Bien sûr, elle ne s'emballerait pas si personne ne trichait dans le cyclisme. Pour notre part, nous avons manifesté une réelle volonté de lutter contre le dopage. Nous l'avons fait dès le mois d'avril en avertissant que nous ne voulions personne cité dans l'opération Puerto au départ du Tour de France. Cet appel a eu des effets. Ivan Basso, d'ailleurs, a été retiré des listes des participants avant la Flèche Wallonne et Liège-Bastogne-Liège. Un bras de fer s'est engagé entre ceux qui veulent que ça change et un noyau d'irréductibles. Nous avons mis en place une campagne de lutte comprenant 160 contrôles inopinés en dix semaines, dont certains ont porté leurs fruits.
Il sera pourtant difficile d?éradiquer totalement la culture du dopage dans le vélo, non? Pourtant, le cyclisme serait certainement le sport qui profiterait le plus de la disparition du dopage. C'est une discipline faite de valeurs relatives. Les exploits et la légende du cyclisme et du Tour de France sont engendrés par la capacité des champions d'aller plus loin dans la souffrance. Pas par des coureurs pointant leur index vers le ciel en franchissant la ligne d'arrivée sans le moindre signe d'essoufflement. Le dopage est donc profondément l'ennemi du vélo. En plus, c'est un antiaudimat. Nous devons donc tout faire pour reconquérir notre crédibilité.
Est-ce qu?on y arrivera en faisant signer aux coureurs une lettre qui ne repose sur aucune base juridique? Pour nous, cette lettre est la manifestation d'un engagement. Il faut que les coureurs manifestent leur intention de changer totalement leur sport. C'est l'expression d'une volonté commune. Nous avons pris des mesures qu'aucun autre sport n'a prises. Ce n'est peut-être pas sympa de signer cette lettre, mais il faut que chacun s'engage.
Certains prétendent qu?il faut tout effacer et recommencer après une année sabbatique, qu?en pensez-vous? Arrêter serait donner raison aux tricheurs. Est-ce qu'il faudrait aussi arrêter les JO parce que des athlètes ont été convaincus de dopage lors de cette compétition? Je ne pense pas. Je ne vois pas pourquoi on devrait punir les gens qui luttent contre le dopage. / JCE