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Le torero a quitté l'arène

Le sacre du printemps n'a pas eu lieu lors des Mondiaux de Göteborg. Stéphane Lambiel termine son flamenco sur une fausse note, le 5e rang final. Peut-être la fin d'une époque. Ni les oreilles. Ni la queue. Le flamenco est mort et le torero a quitté l'arène sans devenir roi. Le visage fermé comme une huître sachant qu'elle ne contient pas la perle du bonheur.

25 mars 2008, 12:00

Aucun rai de lumière dans le regard noir, aucun éclat de soleil au fond des yeux fermés à l'espérance. Jamais, ou presque, Stéphane Lambiel n'avait terminé un programme libre autant habillé de sombre. Ni les oreilles, ni la queue. Dans cette ambiance de corrida où se battaient six hommes à lames aiguisées, le Valaisan n'a pas réussi à allumer la flamme, la sienne, celle du public, celle de sa danse. Göteborg est resté de glace alors qu'elle devait fondre. Ciel de nuit noire.

Pour que l'essence de son flamenco passe la rampe, il doit se lover dans les mouvements techniques, se dissoudre dans l'art des sauts triples ou quadruples, assurés, fondement de la confiance indispensable à la pure expression poétique. Stéphane Lambiel a tremblé sur ses jambes de plus en plus musclées. A l'entraînement du matin gris, samedi, il enchaîna une superbe combinaison quadruple-triple. Mais se planta sur cet axel de malheur que de jeunes demoiselles de 16 ans passent haut la jambe. «Il doit accepter de mettre en chantier tout un travail de fond» suggéra le bavard Philippe Pélissier, ex-patineur, consultant de la chaîne Eurosports, passionné par Lambiel au point de rêver d'en faire son élève. Au-delà de ce songe, l'homme a peut-être raison. «Même si on n'est pas des machines» expliqua l'abattu. Même si le droit de perdre existe. Même si la défaite appartient au sport. Le visage fermé du Suisse démontre cependant que le perfectionniste valaisan n'a pas du tout apprécié son mauvais passage. Que son dernier flamenco, qu'il souhaita si rouge de passion et de beauté, l'avait condamné à sa propre mort. A la mort d'une époque. D'un cycle. Le hasard qui n'existe pas fait coïncider cette fin avec Pâques, symbole d'espoir, de renaissance, de vie. Magie? à laquelle il faut croire.

«Il y avait de la tension partout. Aux entraînements, dans les vestiaires, sur la glace, dans la patinoire et en dehors.» Stéphane Lambiel ne cherche aucune excuse, mais une explication. Il devra encore plus entrer en lui-même pour savoir comment une telle situation, habituellement favorable à sa force mentale, l'a plongé dans une «extrême nervosité». De Moscou en 2005, date de son premier sacre, à Tokyo en 2007 où il remonta de la sixième place jusque sur le podium, il avait toujours réussi à tirer le profit maximum de la tension ambiante. En Suède, il rentra dans le rang ordinaire, accompagné de Dasuke Takahashi, le favori au titre éjecté du podium, et de Tomas Verner, 20e d'un libre catastrophique que le Valaisan termina au? 7e rang. Techniquement, Lambiel ne fut pas à la hauteur d'une médaille. Et artistiquement son message commence à ne plus être compris. Même par le public. Ce flamenco - «le programme le plus complexe et difficile que je n'ai jamais vu» avait dit Peter Grütter, son coach, il y a deux ans - devait hisser le double champion du monde au-delà du commun des mortels. Il l'a remis sur terre. Sans les oreilles. Ni la queue. /MIC

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