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La vie en rose selon l'Italien Felice Gimondi

Le Giro, 92e du nom, part aujourd'hui de Venise. Le Tour d'Italie célèbre surtout son centenaire. Son histoire est intimement liée à celle de son pays, l'Italie. Triple vainqueur de l'épreuve, Felice Gimondi évoque sa passion et celle de ses compatriotes pour son tour. Une vie en rose…

09 mai 2009, 04:15

«Le Giro fait partie de notre histoire sportive et sociale.» Felice Gimondi (66 ans) est intarissable lors qu'il parle du Tour d'Italie. La passion du vélo est encore vive pour cet ancien grand champion, vainqueur de «son» tour en 1967, 1969 et 1976. «Je ne suis pas le seul à vibrer et à aimer le Giro», emphatise-t-il. «La passion est celle de tout un peuple. Il faut le vivre, même si ce n'est plus la même chose qu'avant.»

Le vélo de Gimondi se conjugue par deux. Impossible ainsi d'évoquer le Giro sans parler des duels homériques entre Gino Bartali et Fausto Coppi dans les années 1940 et 1950. «J'étais «bartaliste», presque par obligation», raconte Felice Gimondi. «Mon oncle, qui tenait une entreprise de transport avec mon père, m'avait dit: «Si tu veux monter dans mon camion, tu dois être pour Bartali». Je n'ai donc pas eu le choix. Mais j'admirais les qualités de ce coureur tenace, courageux et volontaire. Fausto Coppi avait plus de classe, mais il n'était pas aussi dur au mal que Bartali.»

Divisée en deux, l'Italie d'après-guerre vivait chaque édition du Giro comme un combat. «La Gazetta dello Sport» (lire encadré) ne se privait pas de mettre de l'huile sur le feu. «Je me souviens avoir vu passer ces deux coureurs en tête d'une échappée près de chez moi à Sedrina (Bergame)», narre Felice Gimondi. «Coppi avait gagné le sprint et Bartali remporta le Giro avec 47 secondes d'avance sur son éternel rival. Personne ne se souvient du troisième échappé, Gastone Nencini, alors en rose. C'était pourtant un grand coureur qui remporta le Giro en 1957.»

Coppi et Bartali ne doivent non plus pas éclipser les autres grands vainqueurs du Tour d'Italie. Et Gimondi de citer en vrac, Alfredo Binda, Fiorenzo Magni, Jacques Anquetil, Eddy Merckx et le Suisse Hugo Koblet (vainqueur en 1950). «Connaissez-vous l'histoire de Binda?», interpelle le vainqueur de 1967, 1969 et 1976. Oui, mais on le laisse volontiers la raconter. «Il agaçait tellement les organisateurs par sa domination dans les années 1920 (quatre succès entre 1925 et 1929) que le patron du Giro, propriétaire de la «Gazzetta», lui offrit de l'argent pour qu'il ne participe pas à l'édition de 1930», conte «Il gran Felice». «Voilà comment Luigi Marchisio fut sacré cette année-là.»

De ces petites et grandes histoires, le Giro en regorge. Tricherie, corruption, dopage, poussettes, tout y passe. Felice Gimondi n'échappa à certaines de ces péripéties. «En 1967, j'ai battu Anquetil lors d'un Giro tourmenté au cours duquel une étape fut annulée pour excès de tricherie», se rappelle le tombeur du Normand (troisième derrière Franco Balmamion). «Je préfère terminer troisième. Ainsi, Felice Gimondi ne pourra pas dire qu'il m'a battu», s'exclama Maître Jacques.

En 1969, Felice Gimondi s'imposa après l'élimination rocambolesque d'Eddy Merckx pour un contrôle antidopage positif. Le Belge estime avoir été victime d'une machination. «Moi, je sais que je l'ai battu en 1967», réplique l'Italien. «Cette histoire de dopage remontant à 1969 ne me regarde pas.» Le Transalpin fut le premier à consoler le «Cannibale». Le Belge a été blanchi par la fédération mondiale ensuite.

Le geste de Gimondi reflète la grandeur d'un champion encore vainqueur en 1976 avec 19 petites secondes d'avance sur Johan De Muynck. «Peut-être ma plus belle victoire avec celle sur le Tour de France 1965», estime celui qui fut aussi champion du monde en 1973. «En 1976, tout le monde me disait vieux et usé. J'avais réussi à l'emporter grâce à ma ténacité et à mon intelligence tactique.» Du Muynck se consola en 1978.

Tout n'est pas à jeter aux oubliettes dans l'histoire du Giro et du vélo. Felice Gimondi nous a permis de le rappeler. /JCE

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