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Offensive de charme contre une tradition virile

Comme la lutte suisse, le lancer du drapeau rouge à croix blanche est l'apanage immémorial des Helvètes aux bras noueux. Ce bastion du sexe dit fort vacille pourtant, sous l'offensive de charme de deux lanceuses talentueuses.

31 juil. 2006, 12:00

«Mon Dieu, c'est une femme!»: Erika Andenmatten a encore dans l'oreille l'exclamation horrifiée d'une spectatrice lorsqu'elle a lancé le drapeau dans les cortèges de deux fêtes fédérales des jodleurs.

Sa prestation n'avait en revanche provoqué aucun remous parmi les membres du défilé: «Comme si cela allait de soi», se souvient la jodleuse de 52 ans habitant Saas-Fee (VS) et qui pratique son art en pantalon et gilet, comme ses collègues masculins. Erika Andenmatten était bien consciente de son audace et de celle de son maître Hansrüedi Zbinden, de Naters (VS): tous deux contrevenaient au règlement.

Le lancer du drapeau suisse ne peut se faire qu'en costume. Les femmes devraient donc porter leur tenue traditionnelle pour s'essayer aux 46 figures qui constituent le répertoire des virtuoses.

Chacun a dans l'oeil l'image d'un homme en costume envoyant un drapeau très haut dans le ciel: une main sur la hanche bien campé sur ses pieds légèrement écartés, l'artiste fait un grand cercle avec son étendard avant de l'expédier dans les airs grâce à une détente des jambes et du torse.

Les lancers en hauteur peuvent être exécutés en jupe. Pour les multiples figures dites basses, c'est plus problématique. Le drapeau doit passer entre ou autour des jambes et la robe entrave le mouvement.

Une jupe bien gênante

Cette question du costume réglée, les femmes bien formées pourront rivaliser avec les meilleurs compétiteurs, Erika Andenmatten en est persuadée. Elle maîtrise déjà plusieurs exercices comme la «vague autour de la tête», le «point de côté» où le «Pilatus».

Les statuts de l'Association fédérale des clubs de jodleurs, à laquelle se rattachent les lanceurs de drapeau, ne sont pas le seul obstacle: les femmes intéressées ne se bousculent pas au portillon, avoue Hansrüedi Zbinden. Erna Fischbacher, de Frauenfeld, âgé de 42 ans, est la seule autre femme à côté d'Erika Andenmatten à avoir atteint un certain niveau.

Il faut dire que jongler avec des drapeaux grands et lourds est très athlétique. Quand les femmes seront officiellement admises à pratiquer cette discipline, Erika Andenmatten espère qu'on leur donnera des drapeaux à leur taille et d'un poids adapté. Elle a déjà eu l'occasion de tester un fanion de ce type.

Le président des clubs de jodleurs Matthias Wüthrich ne veut pas agir dans la précipitation. L'association présentera une solution, mais seulement après avoir fait un état des lieux et analysé la situation de manière approfondie.

Il est donc certain qu'aucune lanceuse de drapeau ne se produira officiellement début septembre, lors de la fête d'Unspunnen, qui célèbre costumes traditionnels et bergers depuis 200 ans à Interlaken (BE).

Le comité doit s'en tenir aux règles de l'association, a expliqué Peter Wenger, membre du comité. Il verrait cependant d'un bon oeil que les femmes démontrent leur maestria à l'occasion de cette manifestation.

La prochaine édition de la fête d'Unspunnen n'aura lieu que dans 12 ans. Il y a de bonnes chances pour que l'égalité des sexes ait conquis d'ici là le bastion masculin que constitue le lancer du drapeau rouge à croix blanche. / HAT-ats

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