null La cohésion sociale est un bien précieux, car elle est garante de paix et de stabilité. Il faut donc veiller à combler au mieux les fossés qui la menacent: celui entre les Suisses alémaniques et les Suisses romands, par exemple, ou celui entre les villes et les campagnes.

Mais, comme pour les châteaux médiévaux, on peut aussi conserver les fossés, les creuser encore plus, pour défendre une fortification, pour se démarquer de ceux qui sont en dehors de la place forte.

Qu’en est-il du fossé entre les riches et les pauvres? Est-il de ceux qu’il faut combattre ou de ceux qu’il faut accepter comme inéluctables? Toujours est-il que ce fossé-là ne cesse de se creuser, et de manière exponentielle.

Les quatre milliardaires les plus riches de Suisse ont une fortune supérieure à celle des 40% les plus pauvres dans le pays.

Les derniers chiffres de l’ONG Oxfam, peu commentés dans les médias, sont parlants. Alors qu’elle plongeait de nombreux travailleurs précaires dans la misère, la pandémie permettait aux milliardaires suisses d’augmenter leur fortune de plus de moitié (52%). Il faut également savoir que les quatre milliardaires les plus riches de Suisse ont une fortune supérieure à celle des 40% les plus pauvres dans le pays.

La crise énergétique qui a suivi la pandémie n’a fait que renforcer cette évolution: tandis que les uns en profitent pour accroître leurs gains, de manière astronomique souvent, les autres voient leur pouvoir d’achat fondre face à l’inflation. En Suisse, l’un des pays les plus riches du monde, 735 000 personnes vivaient sous le seuil de pauvreté en 2019, et ce chiffre également ne cesse d’augmenter.

La même évolution se produit à l’échelle mondiale, nous dit Oxfam: près de deux tiers des richesses engendrées ces deux dernières années vont dans les caisses des 1% les plus riches.

Mais toutes les tentatives, même modérées, d’instaurer un impôt sur les grandes fortunes échouent, comme à Genève récemment. C’est pourtant ce que préconise Oxfam, pour ne pas laisser la cohésion sociale se briser au fond de ce fossé de plus en plus abyssal.

Quand réaliserons-nous que le temps des châteaux forts est révolu?

Pauvreté: un fossé à creuser ou à combler?

Le théologien Pierre Bühler nous alerte quant au fossé qui ne fait que s’amplifier entre les populations les plus riches et les plus pauvres.