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Trams dans le rétroviseur

Le jeune historien Régis Huguenin a reçu le prix Kunz pour son mémoire sur les transports publics à Neuchâtel entre 1890 et 1914. Il explique cet essor du tram et son impact sur la ville et ses habitants L?historien et géographe neuchâtelois Régis Huguenin, 24 ans, est un des deux lauréats du Prix Kunz 2006, décerné le 16 novembre dernier à l?Université de Neuchâtel par la Société d?histoire et d?archéologie du canton (Shan). Son mémoire de licence en histoire s?intitule «L?émergence des transports publics en ville de Neuchâtel». Il a étudié les liens entre mise en place du réseau de trams et développement urbain entre 1890 et 1914.

25 nov. 2006, 12:00

Comment expliquez-vous ce d?veloppement du tram en un quart de si?cle entre la fin du XIXe si?cle et le d?but du XXe si?cle?

R?gis Huguenin: C'est surtout en raison de l'incapacit? des chemins de fer en 1860 (la ligne des Montagnes et la ligne du Val-de-Travers), qui ont alors une vocation nationale et internationale, de desservir la population locale. Ils passent ? c?t?! Il y a un besoin de relier ces grandes lignes au r?seau local. Une des premi?res pr?occupations de la Ville est d'ailleurs de relier la gare des Sablons au lac o? Neuch?tel se d?veloppe. ?a se fait parall?lement ? un fort d?veloppement d?mographique. Il y a aussi un besoin plus grand de mobilit? et comme au niveau ?conomique ?a fonctionne tr?s bien, il y a une n?cessit? de relations accrues entre les diff?rents espaces.

En quoi les transports publics sont-ils ? l'origine du d?veloppement et de la diffusion de l'?lectricit? en ville de Neuch?tel?

R.H.: L'?lectricit? n'est pas n?cessaire ? l'?closion des transports publics. On utilise l'eau pour les funiculaires, la vapeur, le gaz et la traction hippomobile (chevaux). Il y a une foule de modes de traction, mais il n'y en a aucun qui s'impose et ils sont tous assez on?reux ? exploiter. En 1895, l'?lectricit? arrive en ville de Neuch?tel, mais on l'envisageait d?j? avant. La question de son transport pose probl?me. Il faut les moyens techniques pour transporter l'?lectricit? de l'Areuse ? Neuch?tel. Une fois qu'on a ces moyens, on ?lectrifie les trams. L'?lectricit? fait face ? des r?ticences au sein de la population. Des gens ont peur de l'?lectrocution. Des habitants de la rue de l'Evole s'y opposent ? cause des poteaux et des lignes a?riennes qui leur bouchent la vue sur le lac. L'?lectricit? s'impose finalement face aux autres modes de traction car elle s'av?re plus rentable malgr? un co?t de construction sup?rieur.

Quel a ?t? l'impact du tram sur l'espace urbain et sa transformation?

R.H.: On constate une ?volution parall?le du d?veloppement du r?seau des transports publics entre 1890 et 1910 et une forte croissance urbaine. Il y a une corr?lation entre les deux. Le d?veloppement de la ville est induit en partie par le r?seau des trams et funiculaires. On le voit ? la morphologie de la ville. Neuch?tel est alors centr?e autour de la vieille ville et il n'y a presque rien au-del? de la gare vers 1890. La ville est donc tr?s group?e jusqu'? la fin du XIXe. En 1910, la ville est d?j? beaucoup plus ?tal?e avec une urbanisation presque continue sur l'ensemble du territoire communal et une densit? plus importante le long des axes de transports. On passe d'une morphologie tr?s concentrique ? une morphologie qui suit les lignes de Boudry et Serri?res, du Plan, des Fahys, de La Coudre et de Saint-Blaise.

En quoi les transports publics ont-ils influenc? la relation des Neuch?telois avec leur espace et leur temps?

R.H.: D?s 1910, une fois le r?seau de trams et de funiculaires bien en place, et avec la r?duction de l'espace-temps, l'urbanisation est moins concentr?e autour du centre-ville. Il y a une utilisation plus grande de l'espace communal de la ville avec une urbanisation qui n'a plus de fronti?re. On peut coloniser le territoire de part en part, il n'y a plus de ?vides?. Le tram permet de se d?placer relativement rapidement et r?duit les distances en terme de temps entre les diff?rentes parties de la ville et avec les r?gions environnantes. Un d?but de sp?cialisation de l'espace en d?coule. Serri?res renforce par exemple son caract?re industriel et la vocation d'habitation du centre-ville diminue.

Quelle est l'influence des moyens de transports sur la vie quotidienne et les d?placements des Neuch?telois de l'?poque?

R.H.: Les trams induisent des changements dans la vie quotidienne des Neuch?telois. Le point fort est le d?veloppement de la pendularit? du fait de la r?duction de l'espace-temps. On peut rentrer manger ? midi. Cela se voit dans l'utilisation des titres de transport. Il y a des abonnements sp?cifiques pour les coll?giens et les ouvriers. Ils peuvent faire quatre courses par jour, le matin, ? midi et le soir. Ces abonnements sont massivement utilis?s par les employ?s des usines Suchard de Serri?res. Les ouvriers utilisent le tram quatre fois par jour et ne vivent pas forc?ment pr?s des usines. Il y a aussi une question de facilit? et de confort, pas seulement de temps.

Comment ?volue l'usage du tram entre 1890 et 1910?

R.H.: A Neuch?tel, son usage se g?n?ralise assez vite. On le voit dans le nombre d'utilisateurs qui cro?t rapidement, passant de moins d'un million en 1895 ? plus de cinq millions en 1912. L'usage est surtout quotidien. On a une fid?lisation de la client?le avec le nombre d'abonnements qui se d?veloppe et la vente des billets qui stagne. L'usage se fait surtout sur des petites distances intra-urbaines. Les billets les moins chers - ceux ? 10 centimes - sont les plus vendus. L'usage pour les loisirs est aussi tr?s important, avec davantage de courses le dimanche par rapport ? la semaine, contrairement ? aujourd'hui. Le tram permet d'aller plus loin, de d?couvrir la r?gion. Le funiculaire de Chaumont est une ligne presque exclusivement touristique. / BWE

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