Ce dernier aurait voulu savoir si la décision gouvernementale avait été prise à l'unanimité. Il a été déçu. «Cette décision, c'est celle du collège, un point c'est tout!», lui a retourné la présidente. Et c'est du ressort du collège aussi de désigner qui, en son sein, s'exprime. L'interpellateur s'était étonné de voir Jean Studer répondre à la télévision aux attaques du Conseil fédéral.
Car la remise à l'ordre était déjà venue de Berne. De Christoph Blocher en particulier, qui avait jugé le cas neuchâtelois «inadmissible». Sur les sujets fédéraux, estime le patron de Justice et Police, les exécutifs cantonaux sont priés de s'abstenir.
Pas quand ça les concerne directement, rétorquent les ministres neuchâtelois. Et c'est le cas pour l'initiative Cosa, comme pour les deux lois incriminées, lance à son tour Bernard Soguel. L'asile, les étrangers, les deux domaines touchent de près le département du «ministre» socialiste. «Ce sont les cantons qui sont chargés d'appliquer ces deux lois. Il y a clairement transfert de responsabilités de la Confédération sur les cantons.» Bref, comme le résume diplomatiquement Sylvie Perrinjaquet, «le gouvernement neuchâtelois s'estime légitimé pour s'exprimer sur la question.»
Ça, c'est pour la forme. Reste le fond. Des arguments à la fois économiques et éthiques, lance Bernard Soguel. «D'un point de vue économique, ces lois renient l'histoire suisse et neuchâteloise. Neuchâtel doit son développement aux apports étrangers, on devrait s'en souvenir.» Or, la nouvelle loi sur les étrangers va encore réduire le nombre de permis B, aujourd'hui déjà très limité. «Le 1er septembre, les contingents trimestriels attribués aux cantons ont été épuisés en une demi-heure!», note-t-il, pour illustrer l'acuité du problème. Qui provoquera, selon lui, «une augmentation du travail au noir».
Quant à l'éthique, selon lui, elle est mise à mal dès lors qu'on crée un droit différencié en matière de regroupement familial. Le Conseil d'Etat plaide donc pour une «véritable politique migratoire et d'aide au développement». «Mais cela, les cantons ne peuvent le faire. Nous, ce que nous faisons, c'est tenter d'appliquer une politique de rigueur et d'humanité. Sans laisser aller les choses.»
Que ses collègues des autres cantons se taisent lui importe peu: «Il faut dire les choses clairement à la population.» / SDX