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Le panorama, miroir d'une époque

Arnaud Besson a la fibre historique. Pour son travail de maturité, l'an dernier, il a planché sur le panorama de la bataille de Morat. Son travail a été soumis au concours national La Science appelle les jeunes, qui l'a retenu. Arnaud Besson est le seul Neuchâtelois lauréat cette année. Interview.

25 avr. 2007, 12:00

Arnaud Besson, pourquoi cet intérêt pour ces étranges objets que sont les panoramas? Parmi les sujets cadres proposés pour les travaux de maturité, on nous proposait de réfléchir sur «une image de l?histoire». Comme la reconstitution historique m?intéresse, j?avais déjà eu, avant, l?idée de me pencher sur la bataille de Morat. Etudier le panorama, c?était réunir les deux.

Qu?apporte, à votre point de vue, une étude du panorama en général? Le panorama, c?était le cinéma de l?époque! Ces toiles géantes ? certaines faisaient 2000 mètres carrés ? attiraient des centaines de milliers de visiteurs. Ces installations lourdes et coûteuses nécessitaient beaucoup de main-d??uvre spécialisée et des mises de fonds importantes. Il s?agissait d?une véritable industrie, avec ses investisseurs et ses hommes de marketing. Les sociétés de panorama se livraient une concurrence acharnée. Pour rentabiliser les investissements, il faut plaire au public. D?où ressort le pivot de mon étude: le panorama est représentatif de la mentalité d?une époque.

Comment expliquer cet engouement populaire pour des ?uvres d?art? Ce n?est pas parce qu?ils étaient peints que ces objets étaient considérés comme des ?uvres d?art. D?ailleurs, les académies d?art ne reconnaissaient pas aux peintres de panorama la qualité d?artiste. Le panorama peut plutôt être considéré comme le premier véritable média grand public de l?histoire. Il a démocratisé l?accès à l?image, jusqu?alors réservé aux élites. Le peuple n?avait accès qu?aux images pieuses, aux vitraux et aux dessins reproduits dans les journaux. Avec le panorama, il accède à une image d?un réalisme inouï, reproduisant des scènes encore d?une fraîche actualité.

Quels sont les thèmes les plus fréquemment illustrés? Les batailles. Mais si, en Europe voisine ? France, Allemagne ? on représente des batailles contemporaines, en Suisse, on est bien en peine de le faire. Dans mon étude, je montre que le panorama a été utilisé, en Suisse, pour exalter la construction de la Suisse moderne, qui s?unifie sous la bannière du fédéralisme. Faute de glorieuses batailles récentes, on va pêcher dans le passé de quoi exalter le mythe de l?unité helvétique. Les affiches publicitaires des panoramas sont éloquentes à cet égard. Une image montre par exemple Bubenberg, le défenseur de Morat, remettre le drapeau suisse au président de la Confédération Emil Welti. L?anachronisme ne dérange apparemment personne et a le mérite de souligner le véritable but du panorama de la bataille de Morat: exalter le mythe suisse à travers l?évocation d?un glorieux passé. C?est une marque claire de l?influence d?un courant politique nommé historicisme. Une autre affiche, placardée à Zurich, reproduit un poème patriotique d?Albrecht von Haller: «Arrêtez-vous, Helvètes ! Ci-gît la vaillante armée qui fit tomber Liège et trembler le trône de France. Ce n?est pas le nombre des hommes ni l?art de leurs armes qui vainquit l?ennemi, mais l?union qui les anima (...)» Difficile d?être plus clair! / LBY

Le panorama - Une image de l?histoire au XIXe siècle: l?exemple de la bataille de Morat, par Arnaud Besson, travail de maturité 2006, lycée Denis-de-Rougemont
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