L'esprit de recherche du collectif Dom prend la forme d'une galette

Dom-Prod sort son premier vinyle dans une esthétique techno minimale pointue qui caractérise ce collectif. L'activité de ces DJ's neuchâtelois indépendants continue à se propager loin à la ronde. Depuis six ans, le collectif neuchâtelois de musique électronique Dom égraine ses rythmes planants et déroutants sur les «dancefloors» plutôt indépendants de Suisse romande. Un label créé par Mirko, Vladimir, Matthias et Po qui réussissent à réunir à Neuchâtel un large public autour de rythmes exigeants, veloutés. Une techno un rien caramélisée, parfois cramée dans l'ardeur d'une rythmique déjantée. Une techno tribale, répétitive, entêtante, qui visiblement envoûte: «Notre soirée du 14 avril à la Case à chocs a attiré la génération des 25-40 ans. Les gens commencent à comprendre que l'on peut aussi bouger avec cette qualité de son ici.»

13 juin 2007, 12:00

Ces DJ's sortent ces temps-ci un premier vinyle pour perpétuer l'esprit de la techno minimale pointue, «de la musique spatiale et raffinée», s'amusent Po et Mirko avec un vocabulaire volontairement gourmand, sur une terrasse, en évoquant ce qu'ils qualifient de style adulte.

Autoproduit par Dadive, cette grande galette a été baptisée non sans humour «Linguistique musicale» pour les DJ's réaliser un CD ne correspondait pas à leur philosophie: «Le 33 tours est un objet hyper-symbolique pour nous, de la matière sonore. On peut aussi découvrir cette musique en mp3 sur notre site. Mais nous, on aime toucher le disque, ce contact physique.» Et rechercher des sons différents même dans une musique extrêmement codée: «Kraftwerk a montré il y a bien longtemps qu'une voie expérimentale existait. On tente de conserver cet esprit en prouvant que même diffusé très fort avec des infrabasses surpuissantes, notre langage peut être posé et inventif.» Ils se battent contre la techno commerciale qui pollue les ondes. En écoutant les titres sur le net on se laisse surprendre par le développement lent des thèmes, les variations aléatoires, les pulsions sourdes et ce groove organique tentaculaire.

Les Neuchâtelois espèrent aussi que ce disque va être joué sur les dancefloors européens les plus importants: «Notre ami DJ Luciano, mondialement connu, a promis de le jouer, Serphain et Tyro 2000 aussi. Si un projet comme celui-ci peut entrer dans les «playlists» mensuelles de DJ's emblématiques, ce serait une manière de montrer aux grosses maisons de disques que l'on peut travailler autrement. Les petits labels amènent de la fraîcheur dans le monde parfois formaté de la techno. Un DJ crée une tendance qui peut devenir la référence.» Po et Mirko estiment que 600 petits producteurs à travers le monde permettent à la minimale techno de se diversifier.

Au mot subvention, ils préfèrent aujourd'hui celui de subversion et veulent rester autonomes. Avec les éventuels profits réalisés par ce disque, ils souhaitent en réaliser un second.

Le succès de l'aventure dépend aussi de l'enthousiasme du DJ au moment de jouer le titre: «Même la pire des émeutes peut être soûlante, si le musicien ne s'investit pas.»

Le collectif part aussi à la conquête des grands magasins de disques indépendants, notamment à Berlin et Barcelone: «On aime le contact avec ces disquaires amoureux de la musique, on leur passe notre vinyle de main à main. On conserve ainsi le côté artisanal pendant tout le projet et on s'assure qu'ils ne le vendront pas comme n'importe quel produit.»

Au chapitre des projets, le collectif Dom aimerait lancer Stratos, un gros festival qui permettrait de faire circuler les disques et d'attirer encore plus l'attention des grands centres comme Zurich sur le petit Neuchâtel. Après avoir accueilli des pointures comme Water Lily ou Vitalic, le collectif veut continuer à valoriser «la musique classique du courant électronique.» / ACA

«Linguistique musicale», un disque disponible sur www.dom-prod.ch