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Trente-neuf ans: c’est la moyenne d’âge des 26 employés de l’horloger Kari Voutilainen à Saint-Sulpice. Alors que la main-d’œuvre expérimentée se fait rare dans l’horlogerie, l’artisan apprécie de donner sa chance à la jeunesse: «J’aime embaucher les jeunes à la sortie de leur formation, car ils n’ont pas encore pris des habitudes.»

Etablie au sommet du Chapeau de Napoléon, au-dessus du Val-de-Travers, la manufacture fait naître une soixantaine de montres par année. Des bijoux mécaniques uniques, parce que chaque pièce qui les constitue est unique, faite à la main.

«Je ne pensais pas commencer ma carrière professionnelle ici», témoigne Hugo, Fribourgeois de 23 ans. «J’avais entendu parler des montres Voutilainen par les revues de prestige et les concours. J’ai été très surpris d’être embauché.»

«C’est excitant quand ça prend forme»

Titulaire d’un CFC d’horloger rhabilleur, Hugo a complété sa formation avec un diplôme ES de technicien en restauration et complications horlogères. Après avoir accompli son service militaire, le jeune homme a présenté une candidature spontanée auprès de l’horloger finlandais d’origine, qui l’a reçu pour un stage de trois jours avant de lui proposer un contrat.

«Le travail artisanal m’a toujours attiré», avoue-t-il, le voilà servi: «Je suis en train de faire mes deux premières montres, je commence à tout assembler. C’est assez excitant quand ça prend forme», sourit Hugo.

«Le travail artisanal m’a toujours attiré», raconte Hugo. Photo Lucas Vuitel

«Travailler ici est sans doute plus proche de l’image que se font les jeunes du métier», présume Kari Voutilainen. Pour lui, les manufactures horlogères se déclinent en deux opposées: les groupes industriels où le travail est fractionné et répétitif; et le travail artisanal, où l’horloger assume toutes les étapes de fabrication, de A à Z.

Ayant effectué son apprentissage dans l’industrie, Elodie, 25 ans, le confirme: «Ici, c’est vraiment touche à tout! On ne fait pas deux jours de suite la même chose.» Titulaire elle aussi d’un CFC d’horlogère rhabilleuse, la Covassonne avoue: «En venant ici, on recommence un peu une formation. Heureusement, j’ai des collègues patients, qui m’ont appris plein de choses.»

«En venant ici, on recommence un peu une formation», détaille Elodie. Photo Lucas Vuitel

Une certaine idée de l’esthétique

Pour Kari Voutilainen, travailler de façon artisanale est une formation continue en soi. «La différence avec les grands groupes est dans l’idée que l’on se fait de l’esthétique. Quand ceux-ci tolèrent quelques imperfections sur les surfaces dans la production de masse, ici c’est impensable.»

Un esprit partagé par Alain, qui a effectué sa formation d’opérateur en horlogerie au sein même de la manufacture, entre 2014 et 2016. Originaire des Bayards, le jeune homme se souvient: «Quand je cherchais un apprentissage, j’ai accompli plusieurs stages dans de nombreux domaines. Mais j’aimais bien la décoration et travaillé avec mes mains. Ce qui m’a passionné, c’est de partir d’une pièce brut et l’embellir.»

Âgé aujourd’hui de 25 ans, Alain connaît sa chance: «Pouvoir travailler dans l’artisanat et réaliser de nombreuses tâches différentes avec soin, c’est vraiment extraordinaire en tant qu’opérateur.»

Au Chapeau de Napoléon, ils sont neuf personnes à nettoyer, polisser, guillocher, monter et régler mouvements et composants. Toutes n’ont pas une formation d’horloger: Carmen était couturière; Barbara vendeuse dans un magasin de sport; et Catherine a travaillé dans une clinique médicale.

«L’important est la motivation et la capacité à faire quelque chose de ses mains», estime Kari Voutilainen.

«En tant qu’opérateur, c’est une chance de travailler dans l’artisanat», sourit Alain. Photo Lucas Vuitel

Moins de rebuts

Dans l’atelier de mécanique situé, lui, au bord de l’Areuse, ils sont six à préparer les matières, régler les machines, usiner les pièces, contrôler la qualité de finition, réaliser galvanoplastie et traitements thermiques.

«Les mécaniciens ont la maîtrise de toute leur chaîne, ils travaillent mieux ainsi, et cela amène un sens des responsabilités bien différents des entreprises où ce sont les départements de contrôle qui valident la qualité des pièces», soutient l’horloger. «Et avec l’expérience, il y a moins de rebuts!»

Barbara (à gauche) et Carmen ne sont pas horlogères de formation, mais elles maîtrisent avec brio les tours droites et les machines à guillocher. Photo Lucas Vuitel

Chez Kari Voutilainen, on engage des jeunes pour parfaire leur formation

A la sortie d’apprentissage, les nouveaux diplômés n’ont pas encore pris de mauvaises habitudes. Kari Voutilainen en sait quelque chose. Exemple avec Hugo, Elodie et Alain.