«Comment remplacer cette expérience fondatrice d’un petit d’homme qui monte sur une scène? Occasion précieuse d’accéder à l’humain, à une société où il fait bon apprendre, où l’on ne fait pas pousser les fleurs en tirant sur leurs tiges mais où l’on tente de donner à chacun le courage de grandir!».

Ce propos tenu au Théâtre du Rond-Point, à Paris, au début des années 2000, lors d’un séminaire consacré à l’éducation artistique, illustre parfaitement ce qui a frappé notre esprit lors du spectacle des élèves de l’atelier «Théâtre» de l’Ecole Jean-Jacques Rousseau du Val-de-Travers.

«D’ici jusque-là», tel était le titre de cette suite de sketches d’auteurs joués par des élèves de 12 à 15 ans. Un titre métaphorique pour ces enfants qui ont tous mérité les applaudissements nourris de spectateurs conquis. Au sein de la troupe, une comédienne a retenu notre attention…

Ces apprentissages dont l’école use pour évaluer et sanctionner, le jeu théâtral les transforme en compétences et bénéfices.

Timide, repliée sur elle, Anaïs connaît un début de scolarité difficile. Rapidement étiquetée «en difficultés d’apprentissage», elle rejoint les rangs de la structure tout exprès créée pour de tels enfants. Elle tente de s’y reconstruire grâce aux bons soins de l’enseignante. Toutefois, la suite du parcours demeure compliquée, les obstacles s’amoncellent, les résultats ne récompensent pas ses nombreux efforts, entraînant un redoublement.

A l’aube de l’adolescence, cabossée, la confiance étiolée, Anaïs n’aime pas l’école! Sauf l’atelier Théâtre où elle parvient à s’exprimer… Elle y trouve «le courage de grandir»!

Dans «D’ici jusque-là!», elle brûle les planches. Posture, mémorisation, diction, maîtrise de soi, Anaïs démontre sa capacité à observer la vie, à ouvrir ses yeux, son cœur et son âme! Elle parle et joue vrai!

Ces apprentissages dont l’école use pour évaluer et sanctionner, le jeu théâtral les transforme en compétences et bénéfices. Pour Anaïs et tant d’autres, le théâtre devient une porte ouverte sur la vie.

Le propos de Michel Bouquet, disparu ces jours, frappe alors notre esprit: «Les spectateurs ne viennent pas regarder jouer les comédiens, ils viennent jouer avec eux!».

En dépit et grâce à l’école!

A l’école de la vie!

Claude-Alain Kleiner, pédagogue, revient sur le spectacle des élèves de l’atelier «Théâtre» de l’Ecole Jean-Jacques Rousseau du Val-de-Travers, qui l’a particulièrement touché.