Deux fois premier ministre, ministre à moult reprises, surnommé parfois «Dottor Sottile» (Docteur subtil), Giuliano Amato est aussi un grand spécialiste de droit constitutionnel. Et c'est à ce titre qu'il était honoré samedi par l'alma mater neuchâteloise, grande pourvoyeuse de constitutionnalistes avisés. Quant à savoir si l'honneur était pour le ministre ou pour l'Université, Giuliano Amato répondait aimablement «pour moi, bien sûr», en même temps que le doyen de la faculté de droit, Pascal Mahon, s'empressait de répondre que non, bien sûr que non, que c'était «un grand honneur pour Neuchâtel!»
Echange de politesses, de sourires, serrement de mains: l'homme politique italien, toujours aimable, répondait gentiment à tous ceux qui l'abordaient, mais toujours sous haute surveillance. «J'admire votre engagement, je suis un Européen convaincu», lui confiait un participant au Dies. «Merci, merci beaucoup.» Quant à la journaliste qui lui demandait quel aurait été son choix s'il avait dû se décider entre carrière académique et vie politique, il répondait tout aussi aimablement que les deux voies lui étaient indispensables: «La carrière politique, je l'ai faite pour comprendre les institutions de l'intérieur. C'est le but de mon engagement.»
Et ce doctorat, que couronne-t-il? «Il m'amène à penser à ce que j'ai fait durant ma vie, à regarder en arrière. Cela a sans doute quelque chose à voir avec le fait que je deviens vieux...». Mais au fait, Amato était-il un brillant étudiant? «Oui, je crois qu'on peut le dire... » Même le gorille tout près de lui, celui avec l'oreillette, a souri!
Quant au recteur Alfred Strohmeier, il relevait en remettant au ministre son rouleau bleu que Giuliano Amato avait contribué de façon «majeure» au développement du droit constitutionnel comparé et du droit européen et qu'il avait oeuvré «à la connaissance et au rapprochement des peuples.» Des qualités qui ont notamment fait de lui un politicien hors normes, capable de dépasser les clivages politiques et de rapprocher les antagonistes, mais aussi un éminent juriste: il est, avec Valéry Giscard d'Estaing et Jean-Luc Dehaene, l'un des pères de la Constitution européenne. Il enseigne d'ailleurs encore, à Florence et à New York, malgré un agenda... de ministre: vendredi, il était aux Etats-Unis, puis à Naples, et samedi il est arrivé à Neuchâtel sous escorte policière. Double escorte, puisque celle-ci, vaudoise au départ de Payerne, était neuchâteloise à l'arrivée. Le fédéralisme, c'est ça aussi. /FRK