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Quand l'amour fou embrase les chairs flétries du 3e âge

Inge vit tranquillement avec son mari Karl. Elle rencontre Werner: c'est le coup de foudre, l'amour-fou. Rester avec Karl? Lui avouer ce qui lui arrive? Rejoindre Werner? En parler avec sa fille? Questions assez banales! Alors, banal le 6e film d'Andreas Dresen?

28 nov. 2008, 10:30

ACannes, en mai dernier, le jury d'Un certain regard lui a décerné son «Coup de cœur» au «7e ciel». Il y a quelques jours, à Genève, Cinéma tous écrans a accordé à Ursula Werner le prix d'interprétation féminine. De quoi mettre la puce à l'oreille! Pas banal du tout, ce «7e ciel»! Inge, couturière, a un peu plus de soixante ans. Elle vit depuis trente ans avec son mari un peu plus âgé qu'elle. Son voisin Werner a septante-six ans! L'amour fou est immédiatement physique, l'une et l'autre nus, avec une grande sensualité et un plaisir immédiatement partagé. Comme un dernier don du ciel? Non: très naturellement. Il y aura même une panne; et le plaisir solitaire. L'amour fou au troisième âge reste possible, avec une évidente tendresse, d'attention à l'autre, de volonté de partage.

Evidemment, cela va poser de problèmes. Contre l'avis de sa fille, ce sera l'aveu d'Inge fait à Karl, sans en référer à Werner. Karl n'y comprend rien. Inge se sent coupable mais revendique son droit de continuer à vivre. Le ton montera. La blessure suivra, calme retrouvé. Pas un instant de voyeurisme, pas une seconde d'impudeur devant des chairs qui commencent à flétrir: un profond respect d'un cinéaste de 45 ans qu'une génération sépare de ses personnages. Un film d'une grande dignité, pas revendicateur, qui montre comment l'amour reste possible au troisième âge et dans toutes ses déclinaisons.

Pour nous, francophones qui avons une solide méconnaissance des forces du cinéma allemand, belle surprise offerte par ce film stylistiquement plus riche que «La bande à Baader». Une élégante leçon de cinéma! Peu de dialogues: les acteurs sont suffisamment complices du réalisateur pour faire comprendre leurs sentiments par des mouvements du corps, des gestes, des regards, une expression du visage. Un découpage assez étonnant avec de nombreuses unités dramatiques se limitant à un seul plan: une aussi bonne utilisation du plan-séquence est chose plutôt rare. Une belle idée: un chœur féminin intervient à cinq ou six reprises, chants en allemand, mais paroles sous-titrées: complément indispensable puisque cette sorte de chœur antique commente la situation.

Une grande finesse dans les détails: Werner se passionne pour d'anciennes locomotives. Près de leur demeure passent régulièrement des trains de banlieue. Il aime voyager en train pour découvrir la beauté des paysages qui défilent. Karl se passionne pour la nature, les promenades à bicyclette, la force vitale d'un vieil arbre tordu. Inge, avec son mari, dans un train, se dira émue par les paysages… et les arbres!

Le «7e ciel»: la dignité d'un sujet rarement traité, une réussite formelle qui contribue à le rendre émouvant. /FYL

Neuchâtel, Apollo 3; 1h38

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