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Productrice de pudeur

En accueillant la productrice Eliane Victor lundi, le Musée d'ethnographie de Neuchâtel, a rappelé la mémoire de l'émission «Les femmes aussi» de l'ORTF. Des documentaires filmés par de futurs grands cinéastes. Eliane Victor ne cache rien de ses origines bourgeoises et de sa vie confortable avec son deuxième époux, l'explorateur Paul-Emile Victor. Cette pionnière du regard sur les femmes à la télévision, a même confié lundi au Musée d'ethnographie de Neuchâtel, que son lien privilégié avec l'homme de médias Pierre Lazareff lui a permis d'entrer dans le monde particulier des débuts de l'audiovisuel: «En 1964, un collaborateur de «Cinq colonnes à la Une», l'émission de reportages de l'unique chaîne, m'interpelle: «Vous allez continuer longtemps à servir la soupe à ces messieurs?»

18 avr. 2007, 12:00

Eliane Victor devient la productrice de «Les femmes aussi...», une série de plus de soixante émissions qui, en neuf ans, contribue à changer le regard et la place des femmes à la TV: «On proposait une nouvelle manière de faire de la télévision en mettant des destins de femmes au centre des préoccupations grâce à notre collaboration avec les meilleurs metteurs en scène de l'époque.»

Lundi, le nombreux public de la conférence organisée par le Bureau de l'égalité des chances de l'Université, l'Institut d'ethnologie et le Musée d'ethnographie a pu visionner «Micheline, six enfants, allée des jonquilles» réalisé par Claude Goretta.

Portrait frontal d'une vie harassante consacrée toute entière aux enfants, où Micheline confie son constant épuisement. Après la projection, la metteure en scène de théâtre Macha Makeïeff, une amie et une admiratrice des émissions produites par Eliane Victor, dit: «Je suis bouleversée par la beauté plastique des images, nous nous retrouvons face à un vrai regard de cinéaste. Ce spectacle de télévision donnait à nos mères de la force et leur offrait l'occasion de dialoguer avec leurs filles.» On remarque aussi la qualité du travail de reporter réalisé par l'auteure Françoise Mallet-Joris: «Elle laissait une place centrale aux silences, c'était du grand art», se souvient Claude Goretta.

Le cinéaste genevois explique aussi que le but de l'équipe pendant les quinze jours de préparation, puis les quinze jours de tournage au c?ur de l'univers familial, était de se faire oublier et accepter. «Le soir, la famille retirait les portes d'armoire de leurs gonds, et l'équipe mangeait là. L'aîné avait le même âge que ma fille, je l'ai emmené avec nous en vacances. Mon assistante est devenue la marraine du dernier. Ce film a d'ailleurs été mon dernier documentaire, je commençais à diriger les enfants et j'ai pensé que ce que j'avais à montrer se situait dorénavant dans le champ de la fiction.»

Pour Eliane Victor et Claude Goretta, il importe de rappeler le contexte historique de l'époque: «Parler du planning familial dans un documentaire, c'était dérangeant et subversif.»

Trois thèmes ont été refusés à la productrice: l'avortement, l'homosexualité féminine et la contraception. Elle se souvient par contre d'une émouvante émission avec un couple mixte ou de Simone Signoret retournant au rayon casseroles d'une grande surface. / ACA

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