Au début des années 1970, les nationalistes ont tenté à deux reprises de limiter le nombre d'étrangers. La population suisse a refusé par deux fois les initiatives Schwarzenbach, du nom de leur auteur. En 1970, le oui a tout de même atteint 46%, alors qu'en 1974, il a reculé à 34,2%. Dans le canton, les résultats ont été sans appel pour les xénophobes. La première fois, le non neuchâtelois (60,9%) est le plus fort de Suisse. Un rejet réitéré lors de la seconde votation avec 74,6%. La mère de Guido se souvient tout de même des vexations orales qu'elle a subies à l'école. Certains de ses petits camarades répétaient bêtement les crétineries entendues à la maison. En 2027, les Italiens, les Espagnols ou les Portugais n'ont plus à répondre aux invectives des xénophobes. Par contre, les Africains ou les Arabes font encore l'objet d'une discrimination latente.
Dans les Montagnes neuchâteloises, l'arrivée massive d'étrangers - «c'est-à-dire de non Neuchâtelois», précise Raoul Cop dans «Histoire de La Chaux-de-Fonds» - date de la période 1735-1750, qui coïncide avec le décollage de l'horlogerie. «La Chaux-de-Fonds et Le Locle vont abriter une population cosmopolite plus ou moins stable issue de nombreux horizons de l'Europe occidentale», écrit l'historien local. Bernois, Jurassiens bernois, puis Vaudois, Genevois, Franc-Comtois viennent s'installer. Les Allemands commencent à affluer après 1750. «Ils sont essentiellement tailleurs, cordonniers et boulangers.»
Au XIXe siècle, la vague d'immigration ne recule pas. En 1820, on compte à La Chaux-de-Fonds 17% de Confédérés non neuchâtelois. Ils sont 51% en 1900. Le nombre de ressortissants d'autres pays croît aussi. Ils sont 6% en 1820, 16% en 1860. Un léger déclin est enregistré par la suite puisqu'en 1900, le chiffre atteint 12%. «Chose à peine croyable, près du tiers (31,4%) des Chaux-de-Fonniers recensés en 1880 sont considérés comme étant de langue maternelle allemande! Pas étonnant dès lors qu'il faille élever un temple à leur intention», note Raoul Cop en évoquant le Temple allemand. Quant aux Italiens et Tessinois, spécialisés dans les métiers de la construction, ils ne sont que 1,2% en 1880. Les saisonniers ne sont toutefois pas recensés.
La population étrangère diminue durant la première moitié du XXe siècle. En 1950, elle ne représente plus que 6% de l'ensemble des habitants de La Chaux-de-Fonds. Le boum économique va changer la donne. De 10% en 1960, elle atteint 21% dix ans plus tard. Le taux d'étrangers connaîtra une légère baisse après les deux crises des années 1975-76 et 1982-83. Dès les années 1990, il dépasse la barre de 20%. En 2006, les étrangers représentent 28,3% de la population de La Chaux-de-Fonds et 25,6% de celle du Locle. Les communautés des Balkans et de Turquie sont venues grossir les rangs étrangers. Dans les deux villes, la communauté portugaise est la plus grande.
A l'exemple de celle de la branche italienne de la famille de Guido Huguenin, l'immigration a contribué au développement socio-économique de la région. Son histoire est indissociable de celle des Montagnes. /DAD