Le Neuchâtelois est ainsi fait: n'attendez pas de lui qu'il vende son propre pays avec une faconde méridionale. Il est à l'image de sa terre, se dévoilant petit à petit, sans éclats, sans triomphalisme.
De là à l'accuser d'être un faux modeste, il y a un pas qu'il faudra bien oser franchir un jour. Que le lyrisme ne soit pas sa qualité première, certes. Qu'il doute des qualités du coin de pays où il a ses racines, non. Combien sont-ils, sur la planète entière, à pouvoir prétendre à une double inscription au Patrimoine mondial de l'Unesco? Il y a dix jours, La Chaux-de-Fonds et Le Locle savouraient leur triomphe: leur caractère unique de villes forgées par le labeur de leurs horlogers était reconnu comme un élément constitutif de la richesse de l'humanité. Dans deux ans, ce sera au tour des rives du lac de Neuchâtel d'affirmer leur appartenance, comme maillons essentiels, à la grande chaîne de l'histoire des civilisations.
Que l'on remonte trente siècles avant Jésus-Christ ou que l'on s'arrête au c½ur du 19e siècle industriel, ce petit bout de terre d'Europe a toujours joué un rôle majeur de plaque tournante au c½ur du continent. Il faut s'en souvenir, parce que puiser dans son passé donne de l'espoir et aide à bâtir un avenir solide. De même, faire fi d'une propension tenace à la discrétion permet d'oser affirmer sa valeur.
Il aura donc au moins fallu ça pour que le pays de Neuchâtel soit mûr pour la plus estimable des reconnaissances: celle de ses propres enfants.