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Visages de femmes comme un cadeau

08 déc. 2007, 12:00

«Jamais je n'aurais pensé que ces deux toiles seraient accrochées ensemble et évoqueraient ainsi deux extrêmes de la condition féminine», commente le peintre Grégoire Müller. Et elles dialoguent si bien, la femme voilée à l'orientale et la femme dénudée aux cheveux courts, parangon d'une libération à l'occidentale, qu'elles resteront ensemble sur le mur du Centre de santé La Comète, à La Chaux-de-Fonds. Ainsi en a décidé Walter Tschopp, conservateur au Musée d'art et d'histoire de Neuchâtel, auteur de ce petit rebondissement que n'avait sans doute pas prévu la fondation culturelle de la Banque cantonale neuchâteloise (BCN), acquéreur et donatrice des deux ?uvres, l'une destinée à la structure sise dans le Haut, l'autre au musée du Bas...

«Les collections se font en général selon des principes stratégiques basés sur le prestige et l'investissement. Il s'agit ici de soutien et de partage, c'est rare», a relevé l'artiste chaux-de-fonnier, lors de la petite cérémonie agendée mercredi dernier à La Comète. En Grégoire Müller, Walter Tschopp a salué un important peintre d'Histoire, genre en recul depuis l'avènement de la photographie. Soldats calcinés, paysages dévastés par la pollution, entassement de défenses d'éléphants... la peinture de Müller est bel et bien celle d'un homme engagé, d'un artiste qui, par son geste pictural, peut transformer en monuments des événements atroces. «Les hommes ont besoin de mémoire. On érige des monuments aux épisodes glorieux de l'Histoire, mais il faut aussi mettre en mémoire les choses peu reluisantes», dit le peintre. Créer de la beauté à partir de l'horreur: le paradoxe est justifié. «La photographie a une durée de vie plus courte», ajoute-t-il, tout en confessant son humilité face aux reporters qui, eux, travaillent sur le terrain. «Je peins d'après ce que je vois à la télé ou dans les magazines, je pense parfois que c'est un peu confortable d'?uvrer ainsi dans mon atelier.»

En 2001, le Musée d'art et d'histoire de Neuchâtel exposait une galerie de 72 portraits peints entre 1992 et 2000, galerie en grande partie imaginaire où figurait le «couple» acquis par la BCN. Une série certes moins tragique, mais qui reste pleinement ancrée dans la diversité de la condition humaine «tel qu'on la vit aujourd'hui», situe Walter Tschopp. Inspirée de la «Femme 100 têtes» de Max Ernst, la multitude de Grégoire Müller procède d'une réflexion dialectique sur l'individu et la foule. «Ces portraits reflètent tout ce qui peut nous distinguer les uns des autres: sexe, âge, origine ethnique, statut social,... Nous sommes tous uniques, c'est un miracle, mais je me suis interrogé sur la possibilité, ou l'impossibilité, de maintenir une identité dans une foule.»

Femme voilée, femme dénudée... Au centre La Comète, chaque visiteur est libre de dialoguer à sa guise avec ces deux visages.

Grégoire Müller est l?hôte de Daniel Fazan dans l?émission «Intérieurs», demain à 23h sur la RSR
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