Un troisième volet en cabotage automatique

25 mai 2007, 12:00

Le cinéaste Gore Verbinski est toujours à la barre de la saga «Pirates des Caraïbes». A la cour du «Nouvel Hollywood», nul ne doute qu'il ne cingle vers un nouveau succès planétaire avec ce troisième volet des aventures bondissantes du facétieux Jack Sparrow (Johnny Depp), même si la formule s'épuise? Mauvaise nouvelle pour les zélateurs de la flibuste, l'âge d'or de la piraterie semble bel et bien terminé, comme en témoigne le spectaculaire retournement de veste du très gluant Davy Jones (Bill Nighy). Le forban à face de poulpe s'est en effet mis au service de la très officielle Compagnie anglaise des Indes orientales, qui entend exercer une domination sans partage sur la moindre parcelle liquide du globe.

Avec son terrifiant vaisseau fantôme, le renégat visqueux a reçu pour mission de faire rendre gorge à tous les pirates infestant les Sept Mers. Face à cette menace d'extinction, le preux Will Turner (Orlando Bloom), la belle Elizabeth Swann (Keira Knigthley) et le picaresque Barbossa (Geoffrey Rush) n'ont d'autre recours que de rassembler les Neuf Seigneurs de la mythique Cour des frères. Palsambleu! L'un de ses membres les plus éminents, le capitaine Jack Sparrow, manque à l'appel? Sans attendre, nos héros font alors voile vers des mers orientales inconnues pour se mesurer au perfide Sao Feng (Chow Yun-fat) qui détient les précieuses cartes maritimes qui mèneront peut-être au lieu mystérieux où est retenu Sparrow?

Lorgnant encore plus vers le fantastique, cette nouvelle croisière battant pavillon noir présente une succession de péripéties empilées sans queue ni tête, qui fera peut-être perdre la boule aux pauvres spectateurs qui n'auraient pas eu l'heur de voir les deux premiers épisodes. On ne peut plus décousu, ce scénario semble uniquement voué à redonner du lustre au vieil adage «l'union fait la force», en l'appliquant à la défense de la libre entreprise menacée par le «monopole». Seule cette lecture idéologique sauve du naufrage ce «Jusqu'au bout du monde» qui souffre visiblement d'avoir été tourné en même temps que «Le secret du coffre maudit». Cette manière de faire limite certes les coûts, mais nuit gravement à la qualité et à l'originalité de la narration. Prié de rentabiliser décors et effets spéciaux, le réalisateur accumule les vignettes spectaculaires mais en oublie toute progression dramatique.

Exploitation cinématographique tardive de l'une des attractions phares de Disneyland (dès 1966), l'épopée «Pirates des Caraïbes» s'achève (provisoirement) sur une sensation de déjà-vu assez irritante. Il faut patienter plus de deux heures pour voir enfin un véritable morceau de bravoure avec une bataille navale finale homérique, disputée dans le tourbillon abyssal d'un maelström gigantesque? Nous étions prêts à souquer ferme, mais peut-être pas à ce point! / vad

Neuchâtel, Arcades (V.F.) et Apollo 2 (V.O.); La Chaux-de-Fonds, Plaza; 2h52