Une pièce montée qui s'écroule dans l'escalier... On s'en doute d'emblée, la cérémonie de mariage orchestrée par le cinéaste français Denys Granier-Deferre, fils de Pierre, ne se déroulera pas tout à fait comme les familles l'auraient souhaité...
Autour des mariés (Jérémie Renier et Clémence Poésy), les clans se reconstituent au fil des arrivées. Dans ces rangs embourgeoisés, on s'interroge sur le choix de l'église, petit édifice anonyme d'un village paumé dans la nature.
Film choral qui se concentre sur une seule journée, «Pièce montée» zappe d'un invité à l'autre, avec un sens du rythme qui ne s'assimile pas, comme on pourrait d'abord le craindre, à un traitement superficiel. Peu à peu, chaque personnage se dessine, les masques tombent. Curé pour le moins atypique, Victor (Jean-Pierre Marielle, magnifique) envoie valdinguer les convenances au cours d'une bénédiction comme on en voit peu au cinéma. D'autres attitudes s'avèrent nettement plus convenues, telle l'aigreur affichée par la mère du marié (Dominique Lavanant) envers sa belle-fille. Mais d'une façon générale, le fiel s'instille très plaisamment dans le sucre, l'union à laquelle on assiste amenant chacune et chacun à jauger son propre bonheur, ou malheur. Si le vernis se craquelle sans vulgarité excessive, l'entreprise ose, pour la dénoncer, user de cruauté quand une parente hautaine et distinguée (Julie Gayet) relègue une petite trisomique au dernier rang des demoiselles d'honneur.
Dans ce scénario qui s'amuse à jouer avec les codes et les symboles - l'invité au pantalon rose n'est pas gay mais coureur de jupons, le curé succombe à la tentation sous l'il de son serpent ramené d'Afrique - émerge une tendresse réellement émouvante, une ligne de force empreinte de fragilité. L'aïeule de la famille (Danielle Darrieux) retrouve l'amour de sa vie. A la lumière de ce vieux couple hanté par une passion sacrifiée mais pérenne, les «leçons» de la comédie tiennent plus de la sagesse que de la morale insupportable.
La Chaux-de-Fonds, Scala 1; 1h33