Secret aussi, le lieu où la future fondation dédiée à l'un des fondateurs de Kreis 48 pourrait présenter en permanence 70 toiles. Pas vraiment secret, des traces existent. Celles que cet étaleur d'huile voulait conserver de chacune de ses périodes: «Un artiste comme De Kooning, qui ne gardait aucune mémoire de son ?uvre le terrifiait.» Des traces qui à la façon d'une enquête policière où le crime serait de ne trouver aucun indice se disséminent dans la ville à l'emblème de sanglier. Au départ, la fondation Jean-François Comment s'intéressait aux anciens entrepôts d'une coopérative, mais la contamination du sol les en a dissuadés. Puis un projet qui n'a pas abouti, existait à la maison Turberg avec l'artiste Rémy Zaugg: «Quand mon père exposait au Centre culturel suisse à Paris, nous avions rencontré Rémy qui était le curateur de cette magnifique rétrospective Giacometti au musée d'art moderne. Leur complicité me touchait, mon père l'avait aidé au début. En bon Jurassien nous avions fini par boire des verres», raconte Bernard Comment. En fin de semaine dernière, en compagnie de quelques représentants des autorités, l'écrivain visitait les combles de l'Hôtel-Dieu: «Malgré une volumétrie compliquée à cause de plafonds bas, le projet semble être intéressant et viable.» Gérard Guenat, maire de Porrentruy, a d'ailleurs assuré hier matin que Jean-François Comment qu'il a affectueusement baptisé «l'homme à la casquette bleue», mérite que l'on trouve une traduction concrète et tangible de son travail en terre bruntrutaine.
Un circuit touristique autour des vitraux, fresques et mosaïques de l'artiste devrait voir le jour en Ajoie. Dans son livre «Entre deux», Bernard Comment dit bien l'errance qui conduit jusqu'à l'éblouissement inattendu: «Quand nous montons à l'hôpital, avec ses odeurs de peur et d'ennui, nous allons voir les vitraux que mon père a réalisés dans la moderne et élégante chapelle, ce sont à mes yeux les plus beaux qu'il a créés, et la dalle de verre leur confère cette épaisseur presque liquide de la lumière, comme des sirops figés d'arômes inconnus.» Le site internet permet de voir l'artiste en dialogue avec le maître verrier, ou plus émouvant encore, en train d'appliquer la matière comme on jette, comme on se débarrasse, tout en permettant à une poésie jubilatoire et acharnée de naître. L'esthétique de l'abîme en couleurs de sainteté. /ACA
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