«D'accord, mon client n'est pas une brebis égarée, mais ce n'est pas un loup non plus: n'en faites pas un mouton noir.» L'avocat de la défense a filé la métaphore animalière, jeudi au Tribunal correctionnel de La Chaux-de-Fonds, où comparaissait Erevan (prénom fictif), un Arménien brutal et mal adapté, prévenu notamment de tentative de meurtre sur son épouse.
Le tribunal n'a finalement pas retenu cette charge, estimant que la volonté de tuer n'était pas évidente, que l'on avait vraisemblablement affaire à une scène de violence telle que le prévenu avait l'habitude d'en infliger à sa femme.
Injures, menaces, contraintes, mais aussi infractions à la loi sur les stupéfiants, vol, conduite malgré une incapacité: l'ordonnance de renvoi raconte les dérapages d'un homme souffrant de troubles psychiatriques, qui n'a cessé de martyriser sa femme pendant plus de vingt ans, aussi bien en Arménie qu'en Suisse.
Le couple et ses enfants sont arrivés en Suisse il y a une dizaine d'années, mais Erevan ne s'est jamais adapté. Il n'a jamais travaillé, ni même appris le français. «Il vivait aux crochets de son épouse, qui s'était intégrée. Le prévenu n'a pas trouvé sa place dans la société, ni dans sa propre famille», relève le procureur Nicolas Aubert. Car sa femme finit par demander le divorce. Erevan ne le supporte pas. Il la suit dans la rue, vient sonner chez elle, l'appelle nuit et jour, la harcèle, la menace. Il veut la convaincre de renoncer au divorce et de retirer la plainte pénale qu'elle a déposée contre lui après une violence de trop. Un matin, il lui serre le cou, pour la faire taire, dit-il, et la menace de la tuer.
Depuis, il est en prison et prend un traitement psychiatrique approprié. Le procureur estime qu'«on est sûr de se tromper si on ne réclame pas une mesure institutionnelle. Pour lui, ce ne sera pas une sanction mais une chance.» Le rapport d'expertise le décrit comme incontrôlable, dangereux et souligne le risque de récidive.
La présidente Valentine Schaffter a ordonné une peine de 13 mois de prison ferme, moins huit de préventive. Erevan devra suivre un traitement psychiatrique institutionnel. La juge a aussi retenu les conclusions civiles réclamées par la partie plaignante: Erevan devra verser à son épouse une indemnité pour tort moral de 1000 francs ainsi que des dommages et intérêts pour 2500 francs. Les frais de la cause, 7000 francs, seront à sa charge. /sab