«J’ai un méchant coup de barre. Plus de jus, comme si on m’avait pompé toute mon énergie. Et le pire, c’est que chaque année, ça m’arrive plus tôt. Avant, c’était en automne, je mettais cela sur le compte de la saison, mais maintenant, paf, ça me tombe dessus fin juillet. A ce taux-là, il en faudra bientôt trois comme moi pour assurer le boulot.
Au début, ça ne m’inquiétait pas trop. Je les trouvais même plutôt sympathiques, ces petits bipèdes qui s’étaient installés chez moi. Ils bossaient, domptaient, domestiquaient; bref, ils mettaient de l’ordre. Mais petit à petit, j’ai trouvé qu’ils en faisaient un peu trop.
Ils ont commencé à aller partout et à faire comme si c’étaient eux les maîtres. Sans rien me demander. Depuis quelque temps, c’est carrément devenu insupportable. Au point que même eux se sont dit qu’il fallait faire quelque chose, sinon ils me feraient péter le caisson. Hélas, il y en a toujours un pour gueuler plus fort que les autres qu’il n’y est pour rien.
Comme si c’était de ma faute? C’est moi, peut-être, qui fouille dans mes entrailles pour trouver de l’énergie qui, de toute façon, finira en fumée? C’est moi toute seule qui ai ces bouffées de chaleur tellement fortes qu’elles font fondre mes pôles? Et vous croyez que c’est par plaisir que j’ingurgite ces fichus plastiques qui flottent dans mon eau?
J’ai beau être leur bonne vieille Terre, je me demande si je vais les supporter encore longtemps.»