Une musique tzigane belle à faire pleurer les sédentaires

Rodinka, ou cinq musiciennes tchèques issues d'une même famille, ont envoûté le public par leurs vieilles mélodies tziganes, slaves et moraves jeudi soir au port de Neuchâtel. Le Bateau libre commence à se faire connaître. Et à séduire. Les cinq musiciennes de Rodinka ont un «petit faible» pour Neuchâtel. Il y a douze ans, ces voyageuses originaires des terres moraves et issues de la même famille faisaient leur première escale en ville, au Buskers Festival. «Mariana était encore bébé. Elle dormait dans la caisse à accordéon. Aujourd'hui, elle joue du violon avec nous», raconte la chanteuse Stania Hejna, dans un français teinté de douces sonorités tchèques.

07 juil. 2007, 12:00

Jeudi soir, ces fascinantes femmes de là-bas ont à nouveau posé les boîtes de leurs instruments à Neuchâtel, le temps d'un concert sur la route entre Prague et Carcassone, histoire de faire tourbillonner le «Ville de Neuchâtel» et les d'ores et déjà nombreux amoureux du Bateau libre.

«Rodinka, ça veut dire petite famille en tchèque», raconte Stania au public. Drahomira et Dita saisissent alors leurs accordéons, Kristyna et Mariana leurs violons, puis ces femmes vêtues de dentelles emmènent les spectateurs aux confins des champs de Moravie, des plaines de Russie et des villages reculés d'Ukraine et de Roumanie. Des voyages restitués dans l'album «D'ici et de là-bas».

«C'est l'histoire d'une délaissée qui attend son amoureux depuis 40 ans. Il avait promis de l'épouser. Mais il ne vient pas!», confie Stania. De sa voix claire, franche et ensorcelante, la femme chante, sur des rythmes tantôt moraves, tantôt slaves et tziganes, les travaux des champs ou les insoutenables ronflements des Bohémiens.

Car les musiciennes de Rodinka, basées entre deux tournées dans le sud de la France, aiment les airs traditionnels, en particulier ces vieilles chansons oubliées du folklore des pays de l'Est. Elles composent leur répertoire en partant à la recherche de ces trésors enfouis dans les galetas des personnes âgées. «Une dame de 90 ans nous a remis la bande de l'un de nos plus beaux morceaux. Je n'avais jamais entendu cette mélodie», témoigne Drahomira, qui a fui Prague pour des raisons politiques il y a 25 ans, avant de retourner puiser dans le folklore de ses ancêtres pour chanter son paradis perdu.

Dans le bateau, la nostalgie s'empare des spectateurs. Les musiciennes ne trichent pas. Leurs regards sincères et parfois embués témoignent d'une vie difficile. Mais, toujours, les rythmes s'accélèrent, la musique emporte tout, et l'humour balaie la mélancolie des déracinées. Les notes sont belles à faire pleurer les sédentaires, tristes d'avoir oublié de partir.

Jeudi soir, le Bateau libre a offert un grand voyage au public. Et cela - par la magie de la musique - tout en restant à quai. / VGI

Bateau libre, port de Neuchâtel, concerts durant tout l?été. Ce soir et demain à 21h30, La Ley del Son (Cuba)