Dans un premier temps, elle a, en effet, repoussé toute sollicitation médiatique et a même annoncé refuser toute prise de vue de sa personne lors de la remise de ce prix, qui a eu lieu hier au théâtre du Passage. Au final, elle n'a pas même assisté à la remise de sa distinction (lire encadré).
En 1999, Geraldine Whitakker a créé à Neuchâtel, avec sa fortune et les apports financiers de «quelques autres personnes privées», la fondation Elysium. But officiel: «En Suisse et à l'étranger, soutenir toutes les institutions ou groupe d'institutions de bienfaisance, procéder à des opérations de bienfaisance, ainsi que soutenir toutes institutions privées ou publiques d'intérêt général, que le conseil de fondation estime approprié.»
Première particularité: selon un membre du conseil d'Elysium, aucune autre fondation neuchâteloise ne disposait alors de moyens aussi importants que ceux que pouvait mettre en ?uvre la nouvelle venue. Deuxième particularité: à cette époque déjà, la mécène britannique manifestait un souci de discrétion à la mesure de l'influence qu'allait exercer sa fondation sur la vie culturelle neuchâteloise.
La Fondation pour le rayonnement résume cette influence dans l'annonce du choix de sa lauréate 2006: le mécénat de Geraldine Whittaker, «dont bénéficient plusieurs institutions et compagnies, a notamment permis au théâtre du Passage d'accueillir des troupes aussi prestigieuses que le théâtre Mariinsky ou le Stuttgart Ballet, ainsi que d'autres compagnies étrangères. Leurs spectacles ont été le plus souvent présentés en exclusivité suisse et, tout en faisant le bonheur des spectateurs neuchâtelois, ont offert et offrent encore à Neuchâtel un indéniable rayonnement en Suisse romande.» Ce qui justifiait évidemment qu'on exprimât quelque gratitude à la présidente d'Elysium. «Nous y pensions depuis deux ans. Mais nous étions conscients du côté délicat de l'opération», assure Claude Delley. «Heureusement nous avons été beaucoup aidés par Robert Bouvier, directeur du théâtre du Passage, qui connaît bien Mme Whittaker et a des contacts réguliers avec elle.» Si bien qu'en réponse à la proposition de la Fondation pour le rayonnement de Neuchâtel, la lauréate pressentie a écrit «un gentil mot manuscrit, par lequel elle se disait très honorée» et qu'elle acceptait d'y donner suite. «Mais déjà, elle avait exprimé le v?u que ça se fasse dans la discrétion.» Sans entrer dans les détails, on dira que Claude Delley a quelque peu transpiré pour que ce v?u puisse être satisfait. Il fallait aussi éviter la gaffe qui aurait consisté à donner à la lauréate 2006 le prix habituel, soit 3000 francs. La fondation et la lauréate se sont entendues sur un prix en nature et en rapport avec la passion vouée à l'opéra par Geraldine Whittaker. / JMP