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La puissance souveraine de Latry

Olivier Latry a régné triomphalement vendredi sur les orgues de la collégiale de Neuchâtel pour ce deuxième récital «Les célébrités».

30 oct. 2006, 12:00

Ce qui impressionne peut-être le plus, chez l'organiste de Notre-Dame de Paris, est sa puissance de concentration. Une dizaine de secondes de recueillement entre les oeuvres, d'une rare intensité, puis la supermachine Latry se met en route, enchaînant imperturbablement, mais avec présence et chaleur, les pièces les plus longues et les plus difficiles, demi-dieu sur sa console, sans la moindre partition.

L'entrée est constituée de plusieurs mets de grande cuisine française, où le baroque finissant se mêle aux aubes de la Révolution: «Grand dialogue» de Louis Marchand, où le brillant des jeux d'anches ne cache pas un sens délicat et souple de l'articulation à la française, «Livre de Dijon» de Balbastre, noble et un peu apprêté, dans un mélange étonnant de style sévère et galant, «Noël» de Dacquin, ostentatoire à grand renfort de fanfares.

Mozart ahurissant et improvisation authentique

La «Passacaille» en ut mineur de Bach permet de mesurer la puissance de Latry. Après une introduction simple et solennelle au pédalier, un jeu de variations nous emmène vers toujours plus de virtuosité, avant d'être repris, comme si de rien n'était, comme thème d'une fugue monumentale. Le musicien enchaîne ces cascades de notes avec une aisance souveraine.

La transition avec un Andante de Mozart galant et exquis évoquant le glockenspiel, dans les flûtes de l'aigu du clavier, n'en est que plus savoureuse. Le jubilé de cette année a le mérite de nous rappeler l'existence de l'intéressante oeuvre d'orgue du maître viennois. La page de choix de ce concert demeure en effet l'autre face de Mozart, d'un dramatisme fou dans sa «Fantaisie» en fa mineur. Des modulations ahurissantes, une narration éclatée, au bord de l'abîme sont éclairées par un tempo infernal choisi par l'organiste et assumé par sa technique.

Comme conclusion, place à Olivier Latry, l'improvisateur génial, sur la base d'un choral. La pensée est à la fois accessible et profondément originale. Variété de rythmiques complexes, matériel mélodique riche et neuf, puissants pôles tonaux, exploités de manière audacieuse, contrastes s'insérant dans une forme au développement et aux proportions sans défaut. Du grand art. / ATR

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