La tactique de la police, qui a décidé de «ne pas aller à la confrontation et de protéger les biens», n'a permis d'interpeller aucun des 50 émeutiers. Qu'en pense la justice pénale?
«Je n'étais pas sur place et peux donc difficilement évaluer les nécessités au moment de l'intervention. Cependant, je me demande s'il n'aurait pas été possible de filmer la scène, de prendre des photos, de relever des numéros de plaque, afin d'identifier au moins une partie des fauteurs de troubles», répond le procureur général Pierre Cornu, qui pense en parler prochainement avec les forces de l'ordre.
«J'aurais aussi préféré bien sûr des interpellations et identifications», commente Olivier Guéniat, chef de la police de sûreté. Mais, pour lui, le chef d'intervention a «eu raison» d'agir de la sorte «au vu des moyens» à disposition et du contexte (34 policiers, jardin public mal éclairé, mouvements de foule de 400 personnes essentiellement innocentes, etc.). Comme le calme est revenu après 20 minutes, la police antiémeute a préféré encadrer sobrement la foule que remettre le feu aux poudres et risquer d'autres dégâts que les vitres cassées de la Rotonde. La brièveté de l'émeute à proprement parler n'a pas, selon Olivier Guéniat, nécessité d'alerter la centaine de policiers neuchâtelois en réserve ni les 300 membres des forces intercantonales, mobilisables en trois heures environ.
«Je regretterais que le simple fait que des voyous soient nombreux leur assure l'impunité», réagit le procureur Pierre Cornu. «Il doit être possible d'assurer une répression adéquate dans ces cas-là également, comme cela a pu être fait pour des débordements en marge de matches de football.»
Contrairement aux matches à risques, à la Fête des vendanges ou aux Promos du Locle, où la police planifie son effectif, la grosse bagarre de la Rotonde était «soudaine et exceptionnelle dans un canton calme», rappelle Olivier Guéniat. Mais il réfute les soupçons de crainte et de résignation. Il espère que des témoignages permettront de faire avancer l'enquête ouverte. Et, plus largement, l'état-major va «réfléchir à la manière de faire mieux» face à ce genre d'événements.
En plus de la prévention de dommages à la propriété en cas de dégâts, le Code pénal suisse prévoit l'accusation d'émeute. Amende et prison sont prévues pour «celui qui aura pris part à un attroupement formé en public et au cours duquel des violences ont été commises collectivement contre des personnes ou des propriétés». La rumeur veut d'ailleurs qu'une personne ait été violemment frappée au visage près de la Rotonde. Olivier Guéniat précise que cet «acte de violence urbaine gratuite» s'est produit deux heures avant l'émeute. L'enquête en cours va probablement se diriger sur des lésions corporelles graves. /AXB