Depuis qu'elle s'occupe de la scénographie et du graphisme du MHN, c'est la première fois qu'Anne Ramseyer utilise, comme élément d'une affiche, un membre du personnel du musée. «Mais ce n'était pas mon intention de départ.»
Quand elle a dû plancher sur une affiche pour «Le propre du singe», Anne Ramseyer a d'abord «un peu tâtonné». «Puis», raconte-t-elle, «j'ai été frappée par le regard des singes. J'ai pensé en utiliser une série et glisser dedans, comme une erreur à trouver, un regard humain. Enfin, je me suis demandé ce que pourrait donner un visage hybride. Pour faire un essai, j'ai pris une photo de singe dans un livre et je suis allée dans son bureau photographier Blaise Mulhauser, qui avait l'avantage d'être là.» La juxtaposition des deux images a fait l'effet d'une révélation: «J'étais impressionnée. Ça allait tellement bien que je me suis dit qu'il n'y avait pas besoin de chercher plus loin. Et qu'il fallait le faire avec Blaise.» Il est vrai que, même avec un seul ?il, le responsable des vertébrés du MHN a, dans le regard, une malice assez intéressante.
Pour le singe, il a fallu trouver l'auteur de la photo, négocier avec lui et se faire envoyer l'original. Nettement plus simple avec Blaise Mulhauser, tout de suite d'accord de se prêter au jeu. «Ça ne me gênait absolument pas et je trouvais même l'expérience plutôt rigolote. Finalement, nous sommes des primates comme les autres.»
Aujourd'hui, Blaise Mulhauser s'agace parfois légèrement de l'intérêt porté à l'identité du personnage de gauche de l'affiche. Mais il n'a en tout cas pas de quoi se vexer: «Je sais qu'au moins deux personnes se sont demandées comment notre musée avait pu s'offrir un portrait de George Clooney pour cette affiche», s'amuse Anne Ramseyer.
Plus sérieusement, la graphiste du MHN relève que, lors d'animations proposées par l'Atelier des musées, les participants ont juxtaposé leur propre demi-portrait avec celui d'un singe (pas nécessairement celui de l'affiche). «Il faut avouer que le résultat était chaque fois assez troublant.»
Elle-même a dû aussi réfléchir soigneusement à la meilleure façon de juxtaposer, sur l'affiche, le demi-visage humain et le demi-visage simien. «On aurait pu faire un fondu enchaîné. Mais j'aimais bien l'idée d'une ligne verticale. Finalement, j'ai décidé de grossir fortement les pixels du milieu. Ce procédé permet de créer un sentiment de flou, mais avec un graphisme net, comme je le souhaitais.» Une ambiguïté graphique où l'on retrouve évidemment l'intrigant mélange de parenté et de différence entre nous et les singes. /JMP
«Le propre du singe», Muséum d?histoire naturelle de Neuchâtel, jusqu?au 26 octobre