Les locataires ont requis l'anonymat pour expliquer ce qu'ils vivent depuis le mois de février. Un quotidien qui oblige les familles à se grouper par trois ou quatre pour partager les cuisines et les salles de bains aménagées pendant les travaux dans des conteneurs sommairement équipés. Cela en cohabitation avec les ouvriers. «Suivant l'humeur du jour, les tensions peuvent être vives», avoue un locataire. Une octogénaire a même constaté que son vélo d'appartement avait disparu après le passage des ouvriers dans son logement...
La rénovation des ascenseurs fait également souffrir les nombreuses personnes âgées de ces trois immeubles. Celles-ci doivent ainsi emprunter les escaliers pour aller se faire à manger ou prendre une douche. Sans compter les slaloms entre les piquets d'échafaudages et le matériel employé par les maîtres d'état. L'un des concierges des immeubles prend la chose avec philosophie. «Le jour où ils vont nous enlever ce camping, je serai content», lâche-t-il avec le sourire. Les locataires n'ont pas d'autre choix que de prendre leur mal en patience. Même s'ils estiment, malgré une assemblée préalable, avoir été mal renseignés sur l'ampleur des travaux et leur durée.
Rares ont été les occupants des logements en rénovation à pouvoir se reloger ailleurs. La majorité des habitants ont dû vivre dans des appartements en travaux. «Nous ne pouvons nous tenir que dans notre chambre à coucher», avoue un couple. Dans le salon, les meubles sont protégés de la poussière par quelques plastiques que les habitants ont eux-mêmes posés. A la cuisine, des fils électriques sont encore apparents, et l'ensemble de l'appartement ressemble à un champ de bataille, Pendant la canicule de juillet, les ouvriers ont retiré les stores des fenêtres. «Bonjour la chaleur», soupirent les locataires.
La gérance Wincasa, en charge des trois immeubles, a été assaillie des plaintes et des récriminations des locataires. Elle a cependant botté en touche. «Tout se décide chez le propriétaire», explique-t-elle. Avant de reconnaître que la rénovation est «lourde» pour des immeubles construits dans le milieu des années 1960. «Les locataires n'ont en fait été incommodés que lorsque les ouvriers ont travaillé dans leurs logements» tempère-t-elle. Karin Schwerzmann, chargée de communication du secteur immobilier du Credit Suisse, propriétaire des immeubles, confirme que le mois de loyer offert aux locataires correspond en fait à la réelle durée de la rénovation de chacun de leurs appartements.
«Nous n'avions jamais imaginé ce que nous avons dû vivre ces derniers mois», riposte un locataire. Ce dernier est cependant chanceux. Avec son épouse handicapée, il a pu être relogé il y a dix jours dans un appartement neuf de l'immeuble voisin du sien. Plusieurs déménagements sont intervenus pendant le chantier, et quelques locataires ont pu trouver un gîte temporaire chez leurs proches. Mais pour la plupart, il n'y a pas d'alternative. Il faut attendre le mois d'octobre et la hausse de son loyer... / PHC