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La vulnérabilité des employés face à un licenciement express

Malgré la reprise économique, nombre d'usines ont fermé leurs portes en 2010. Des centaines d'employés restent sur le carreau face à des procédés parfois expéditifs et une législation suisse faisant figure de poudre aux yeux.

04 janv. 2011, 09:02

Fondamentalement, le licenciement collectif n'est pas prohibé. Même quand la procédure n'a pas été respectée, les cessations de contrats restent valables, explique Jean-Philippe Dunand, doyen de la faculté de droit à l'Université de Neuchâtel. Pour illustrer le propos, le fabricant de machines Voumard à Hauterive avait été lâché par son propriétaire allemand Peter Wolters. En un éclair, matériel et cadres expérimentés ont été transférés au nord d'Hambourg.

L'employeur est obligé de lancer une procédure de consultation du personnel dès le licenciement de 10% des effectifs. Mais la loi ne prescrit pas sa durée, il faut se référer à la jurisprudence. La législation se résume à quatre articles du Code des obligations. «Si l'employeur mène habilement la procédure, il peut la liquider en moins de deux mois», relève Jean-Philippe Dunand.

Chez Voumard, elle a été menée pendant les vacances estivales en l'absence de la majorité des ouvriers. Or, les employés doivent pouvoir faire des propositions pour limiter les licenciements ou en atténuer les effets. L'entreprise doit fournir «tous les renseignements utiles à cet effet». Volume des effectifs, nombre de licenciements, motif et agenda prévu sont le minimum qu'elle doit communiquer par écrit.

La procédure doit être effective et non une procédure alibi, commente Christian Bruchez, avocat spécialisé en droit du travail à Genève. Si tout a déjà été décidé avant et si la durée est trop courte, c'est une «vaste farce».

Avant de fermer la brasserie Cardinal à Fribourg, le groupe argovien Feldschlösschen, en mains du danois Carlsberg, a écouté les solutions proposées par les partenaires sociaux. Certes, il les a toutes démontées, mais de façon argumentée.

Les employés ont même droit à des informations sur la situation financière de l'entreprise: cette exigence est posée par l'article de loi, selon Christian Bruchez. Cet aspect n'a pas encore été entériné par les tribunaux mais est admis dans la doctrine.

L'employeur est censé agir de bonne foi, faire preuve d'une transparence suffisante pour permettre une vraie réflexion. S'il a au départ échafaudé un plan ferme et ne prend pas en compte les propositions, son attitude est contraire à l'esprit de la loi. C'est ce qui se produit dans la majorité des cas. Mais la bonne foi et l'esprit de la loi, seuls, ne constituent pas des appuis suffisants pour contrer les mesures annoncées par une direction.

Il faut prouver la violation d'un des articles 335d à 335g du Code des obligations, qui renvoient à l'article 336 sur le licenciement abusif. Toute la philosophie du licenciement collectif repose donc sur celle du licenciement individuel, très peu protectrice.

Le syndicat peut mener parallèlement une action collective en constatation. Si 50 cas sont jugés au même endroit, ils devraient être instruits en même temps et jugés de la même manière.

Mais chaque employé doit d'abord contester son congé par lettre dans les limites du délai, puis agir en justice dans les 180 jours après le dernier jour des rapports de travail, explique Christian Bruchez.

S'ils ne font pas opposition, les employés n'ont guère de moyen de pression pour négocier un plan social. Ceci dit, même ce dernier n'est pas défini dans la loi: c'est une pratique à bien plaire. /MAS-ats

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