Mickaël Simon, avez-vous le sentiment que les agences de placement tirent les salaires vers le bas?
M. S.: Je peux vous assurer que non. En ce qui nous concerne, en tout cas, sachant que nous mettons l'accent sur la qualité et ne sommes pas représentatifs de l'ensemble de la branche. Mais actuellement, pour des postes qualifiés dans l'horlogerie ou dans le bâtiment, nous nous trouvons plutôt dans une situation de surenchère salariale, et non de sous-enchère. Les employeurs ne sont pas à deux ou trois francs près. Ils veulent des gens qui travaillent bien, quitte à les payer davantage, même largement au-delà des conventions.
Cela signifie-t-il que les entreprises qui ont recours à vos services ne le font pas pour des raisons d'économies?
M. S.: Dans sept cas sur dix, le personnel temporaire finit par être engagé en fixe après quelques mois. L'employeur n'a donc aucun intérêt à ne pas respecter les salaires usuels. Par contre, c'est vrai qu'en utilisant une agence, il n'a pas à passer d'annonces, ni à auditionner tous les candidats. Il y gagne, mais surtout en flexibilité. Pas en masse salariale.
On entend souvent dire que les travailleurs français acceptent des salaires moins élevés...
M. S.: C'est un mythe. Les gens parlent et savent très bien combien gagnent leurs collègues. Et un ouvrier français ne gagne pas forcément à venir travailler en Suisse: avec les 35 heures et les avantages sociaux, comme la prise en charge de l'assurance maladie par l'employeur, on trouve de moins en moins de Français disposés à faire une heure de trajet pour venir travailler en Suisse.
Pourtant, le nombre de frontaliers ne cesse d'augmenter!
M. S.: Oui, mais c'est souvent du personnel hautement qualifié. Pour des travaux simples, comme ceux des opérateurs, nous recrutons sans problème localement. Par contre, c'est vrai qu'il faut aller de plus en plus loin pour trouver des gens très spécialisés.
Pourquoi vous êtes-vous installés au Locle? Pour bénéficier du bassin de recrutement français?
M. S.: Pas spécialement, non. Nous avons effectué une étude de marché et il n'y avait aucune autre société de placement sur la place, malgré la présence de nombreuses industries. Mais notre zone d'activité va de la Vallée de Joux au Jura bernois, voire plus loin encore... Nous nous sommes spécialisés dans le bâtiment, l'industrie alimentaire ainsi que l'horlogerie et les microtechniques.
L'horlogerie marche fort. Arrivez-vous à satisfaire la demande en personnel qualifié?
M. S. (qui sourit): Des horlogers qualifiés, on n'en cherche même plus... parce qu'il n'y en a aucun sur le marché. C'est vrai que la branche va très bien, mais je suis de nature prudente: la situation peut s'inverser rapidement. Dans le bâtiment aussi, ça va fort: en début de saison, si j'avais eu 50 maçons devant moi, j'aurais pu tous les placer... / FRK