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Heida, un cépage à la hauteur

Le village haut-valaisan de Visperterminen est la patrie du heida. Un cépage local qui pousse dans le vignoble très en pente et qui est le plus élevé d'Europe. Pour cultiver la vigne à Visperterminen, il faut être un vrai passionné. Ce vignoble de 42 hectares se compose en effet de petites parcelles en terrasses accrochées aux flancs escarpés de la montagne sur 500 m de dénivellation, où tout le travail se fait à la main. De la Vispa, qui coule au fond de la vallée, à plus de 1100 m d'altitude. Ce qui permet à cette commune de 1400 habitants, patrie du cépage heida (païen), de revendiquer l'appellation de «vignoble le plus élevé d'Europe».

09 août 2008, 12:00

A Visperterminen, la présence du heida, surnommé «la perle des vins alpins», remonte entre le 14e et le 16e siècle, relève Pirmin Heinzmann, maître de chai de la cave coopérative St-Jodernkellerei. «Son nom démontre que ce n'était pas un cépage autochtone, car en allemand ancien, heida voulait dire étranger, venant d'ailleurs.»

La commune ne compte aujourd'hui plus que deux vignerons indépendants, et la cave coopérative. Forte de 120 membres à sa création, en 1980, elle en compte aujourd'hui près de 500 et vinifie 90% de l'AOC Visperterminen. Propriétaires de petites parcelles, la plupart gagnent leur vie en plaine et pratiquent la viticulture comme second job.

Depuis la création de la coopérative, Pirmin Heinzmann est responsable de la vinification. Il est à la tête d'une cave très moderne où l'informatique l'aide à gérer avec précision les températures de fermentation pendant la vinification. Avec autant de producteurs différents, la seule façon de garantir un vin de qualité constante, c'est de payer le raisin selon la qualité, explique-t-il. Des inspecteurs sillonnent les vignes pour surveiller la charge des ceps et, au besoin, faire dégrapper. Et à la livraison, un examen minutieux du raisin détermine le prix.

A Visperterminen, la vigne pousse sur une ancienne moraine orientée sud sud-ouest. La région est soumise à de gros écarts de températures: il fait très froid en hiver, et très chaud en été. Le f?hn qui souffle régulièrement assure une bonne ventilation et un bon mûrissement des grappes, même dans les parchets les plus élevés. Le terrain très sec, maigre et sablonneux, doit être irrigué, autrefois au moyen de bisses, aujourd'hui par un vaste réseau de tuyaux.

Au fil du temps, les parchets les plus élevés avaient peu à peu été laissés à l'abandon. Mais pour justifier son appellation de vignoble le plus haut d'Europe, Pirmin Heinzmann et quelques mordus ont créé, en 1999, la Confrérie du heida (Heidazunft). «Avec le soutien du Fonds suisse pour le paysage, nous avons défriché le terrain, reconstruit les murs de pierres sèches, réaménagé les terrasses et replanté ce noble cépage.» La confrérie, qui a construit tout en haut des vignes son repaire, compte 250 membres. Chacun est propriétaire d'un cep et s'engage à participer au moins une fois l'an aux travaux de la vigne. «Employé, avocat ou banquier, tous mettent la main à la pâte dans une ambiance très conviviale», sourit notre homme.

Si Visperterminen s'enorgueillit de son appellation de «patrie du heida», ce cépage a pourtant failli disparaître au siècle dernier, au profit d'autres plus productifs comme le chasselas. Il doit son salut au regain d'intérêt des consommateurs pour les spécialités du cru. Aujourd'hui, le heida couvre un tiers de la surface du vignoble, avec une production d'environ 100 000 kilos.

C'est un cépage aux petits grains doux mais peu juteux. Le vin a un parfum qui rappelle les agrumes et les fruits exotiques, avec une note de noisette. En bouche, il est frais et onctueux, vif et persistant. Sa belle acidité en fait aussi un vin qui se conserve très bien quelques années. Dans le Jura français, le heida s'appelle savagnin, le cépage dont on fait le vin jaune. Pirmin Heinzmann a-t-il essayé de vinifier son heida en vin jaune? «Jamais!» coupe-t-il «ça n'est pas une tradition chez nous!» En fait, il vinifie ce cépage de trois façons: le heida traditionnel, idéal pour l'apéro ou pour accompagner un plat de fromage ou de viande séchée. En barrique, ses arômes se marient parfaitement avec le côté à la fois sucré et acidulé de la cuisine asiatique. Quant à la 3e façon, c'est une cuvée spéciale issue de raisins qui affichent au moins 105 à 110° Oechslé. Le résultat donne un vin doux baptisé Mélodie, qui accompagne très bien un fromage de type roquefort ou un foie gras. «Mais attention, il n'a rien à voir avec une vendange tardive!» /POU

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