Ségolène Royal veut incarner le renouveau de la gauche. Sa méthode: un savant dosage de charme, d'audace et de conservatisme. A 53 ans, cette mère de quatre enfants a réussi à s'installer durablement au firmament des sondages et à s'imposer, en jouant l'opinion, face aux barons d'un parti encore traumatisé par son échec à l'élection présidentielle de 2002, où l'ancien premier ministre Lionel Jospin avait échoué au premier tour.
Ségolène Royal a bâti une partie de sa popularité en prenant position sur des sujets de société souvent négligés par les politiques, comme l'enfance maltraitée, les questions scolaires ou la violence à la TV.
Son idée phare est de créer une «démocratie participative», où l'accent serait notamment mis sur l'éducation et l'écologie. Quant à l'Europe, elle souhaite la «reconstruire par la preuve», avec «des projets qui touchent la vie quotidienne des Français». Certaines de ses positions, considérées comme iconoclastes, ont semé le trouble dans son camp, lui valant des accusations de dérive droitière ou populiste.
Mais la socialiste a revendiqué le droit d'évoquer des sujets parfois tabous chez les siens. Elle a suggéré que les jeunes délinquants soient envoyés dans des camps humanitaires à «encadrement militaire». Elle a avancé l'idée que les élus se soumettent à l'évaluation de «jurys citoyens» et regretté que les enseignants ne soient pas davantage présents dans les écoles.
Accusée de démagogie, Ségolène Royal a insinué que ses rivaux avaient «peur du peuple», des Français «adultes», «meilleurs experts de ce qu'ils vivent», qu'elle a promis d'écouter plus et de doter de pouvoirs nouveaux. Cette ancienne conseillère du président François Mitterrand insiste beaucoup sur la morale et les valeurs familiales, des terrains habituellement occupés par la droite. Son leitmotiv se résume à deux mots: «L'ordre juste». Elle aime mettre en avant son expérience de mère et de présidente de la région Poitou-Charentes.
Sa popularité a eu raison des ambitions personnelles de son compagnon, le patron du Parti socialiste, François Hollande, avec qui elle forme un couple qui détonne dans la classe politique. L'étoile de François Hollande a décliné au fur et à mesure que les sondages s'emballaient pour Ségolène Royal.
Fille d'officier née à Dakar en 1953, cette élégante énarque, au large sourire mais à la réputation autoritaire, est issue d'une famille catholique, mais éclatée. Quatrième de huit enfants, elle a expliqué avoir reçu de son père «une éducation très stricte et même assez rude», qui a nourri un goût pour la rébellion.
A sa sortie de l'Ecole nationale d'administration (ENA), en 1980, cette diplômée d'économie et de sciences politiques devient magistrate, avant de rejoindre François Mitterrand en 1982 comme chargée de mission à la jeunesse, puis aux affaires sociales. Elle restera à l'Elysée jusqu'en 1988, année où elle entre à l'Assemblée nationale comme députée des Deux-Sèvres.
Ministre de l'environnement du gouvernement de Pierre Bérégovoy en 1992-1993, elle reprendra du galon sous Lionel Jospin, d'abord comme ministre déléguée à l'Enseignement scolaire (1997-2000), puis comme ministre déléguée à la Famille (2000-2002). Elle combat le bizutage et le racket, facilite l'accès à la pilule du lendemain et crée le congé paternité.
Désormais, Ségolène Royal, qui veille de près à son image de femme moderne, mince et élégante, a estimé que l'épreuve des primaires socialistes l'avait «endurcie». Et elle se prépare d'ores et déjà au duel apparemment largement attendu contre le favori de la droite, le ministre de l'intérieur Nicolas Sarkozy. / ats-afp