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Massacre de Marikana: les Sud-Africains ne blâment pas leur police

Après le massacre de Marikana qui a tué 34 personnes le 16 août dernier, les Sud-Africains ne blâment pas leur police.

22 août 2012, 07:00
Les dirigeants des syndicats étaient réunis pour décider de la conduite à tenir, dans cette mine qui emploie plus de 30 000 personnes.

Les Sud-Africains sont choqués par les images du massacre de 34 mineurs grévistes par la police à Marikana.

Mais, traumatisés par la violence criminelle dans le pays, ils refusent de faire des policiers les lampistes d'un conflit social mal géré de bout en bout.

Chaque année, une centaine de policiers sont tués en intervention, soit un tous les trois jours. A la mine de Marikana, deux d'entre eux avaient été déchiquetés à la machette par des grévistes quelques jours avant la fusillade du 16 août.
 
Lors des obsèques de ces deux fonctionnaires, la chef de la police nationale Riah Phiyega a lancé à leurs collègues: "Ne soyez pas désolés de ce qui s'est passé" à Marikana.
 
Pour elle, ses troupes étaient en état de légitime défense lorsqu'ils ont tiré sur la foule: "Ils ont été attaqués par un groupe de grévistes, je pense qu'ils n'avaient pas grand chose d'autre à faire.
 
Je pense qu'ils se sont retrouvés contre leur gré dans une situation où ils devaient se défendre".
 
Nombre de commentateurs soulignent cependant que l'institution policière a de gros défauts dont un manque de formation à l'origine de nombreuses bavures.
 
"Ce ne sont pas des médiateurs"
 
En 2010-11, près de 800 personnes sont mortes en garde à vue ou du fait de la police, selon l'autorité de contrôle de la police, et en 2011, la mort en direct d'un manifestant torse nu et non armé, Andries Tatane, frappé à mort, avait mis le pays en émoi.
 
A Marikana, les policiers n'avaient pas de tenues anti-émeutes et ont tiré à balles réelles.
 
Mais les commentateurs dédouanent également les forces de l'ordre, préférant attribuer la responsabilité du massacre aux grévistes, aux syndicats ou au pouvoir, incapables d'anticiper le drame.
 
"Tout les regards sont tournés vers la police, mais je pense qu'il faut voir beaucoup plus large pour comprendre ce qui s'est passé", dit à l'AFP Johan Burger, de l'Institut pour les études de sécurité (ISS). Qui estime que la situation, née d'un conflit social sur les salaires, n'aurait jamais dû se tendre au point d'arriver à un affrontement entre grévistes et policiers.
 
"Quand vous appelez la police pour faire face à ce type de situation, vous prenez le risque d'une aggravation et de pertes en vies humaines, parce que les policiers ne sont pas des médiateurs, ils interviennent en fin processus", note pour sa part Krish Govender, vice-président la Société des Juristes d'Afrique du Sud.
 
A Marikana, les policiers étaient face à une foule en colère armée de lances, de machettes, de barres de fer et, selon certains témoins, de quelques armes à feu.
 
Contexte très violent
 
"La police a fait tout ce qui était en son pouvoir pour empêcher une telle situation", a déclaré la ministre de la Police, Nathi Mthethwa, lors d'un débat extraordinaire au parlement mardi, en soulignant que la fusillade avait été le point d'orgue d'une série d'événements qui sont accumulés au fil des mois.
 
L'Afrique du Sud est une nation traumatisée par le niveau de violence qui règne dans le pays et reste l'un des plus élevés au monde hors des pays en guerre, même s'il marque le pas ces dernières années, affirment les statisticiens du crime.
 
Officiellement, 43 meurtres sont commis en moyenne chaque jour, pour ne rien dire des agressions violentes et des viols.
 
Dans ce contexte, les policiers, qui tombent régulièrement sous les balles des criminels, se situent dans une culture de la violence.
 
"Lorsque vous voyez un criminel pointer une arme vers vous, ne souriez pas. Le canon n'est pas une caméra. Tirez les premiers pour protéger votre vie", avait dit en 2011 un ancien chef de la police lors de funérailles de policiers.
 
Le président Jacob Zuma lui-même avait encouragé les policiers à faire usage de leur arme contre les criminels. Et beaucoup de Sud-Africains estiment que les forces de l'ordre sont avant tout les otages d'une situation sociale explosive.
 
Pour M. Govender, c'est la direction de la mine et les syndicats qu'il faut blâmer pour avoir laissé pourrir la situation, et le gouvernement pour ne pas s'attaquer aux causes des tensions gigantesques de la société sud-africaine.
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