L'Union européenne en pleine cacophonie

05 mars 2008, 12:00

Malgré le scandale d'évasion qui provoque des tensions entre le Liechtenstein et plusieurs d'entre eux, les Vingt-sept sont encore loin d'avoir trouvé la parade pour mater les paradis fiscaux. Hier, ils ont demandé à la Commission de leur soumettre en mai un «rapport verbal» sur le fonctionnement de leur directive (loi) sur la fiscalité de l'épargne. Mais ils restent très divisés sur l'opportunité de la réformer en profondeur.

«L'Union européenne va déclarer la guerre au Liechtenstein, à Monaco, à Andorre et à la Suisse», affirmait le quotidien britannique «The Independent» dans son édition d'hier. Drôle de guerre, en réalité: hier, les ministres des Finances des Vingt-sept ont une nouvelle fois affiché de profondes divergences sur la manière de renforcer la lutte contre l'évasion fiscale en Europe.

Le débat, relancé par Berlin après qu'a été découverte la filière des fondations liechtensteinoises dans lesquelles des centaines d'Allemands ont investi leurs avoirs afin d'échapper au fisc, a principalement tourné autour de la nécessité de réviser la directive européenne sur la fiscalité de l'épargne, et donc des accords que l'Union a conclus dans ce domaine avec cinq pays: le Liechtenstein, la Suisse, Andorre, Saint-Marin et Monaco.

«Je m'attends à de nombreuses années de débats fascinants et fondamentaux», a ironisé le premier ministre et grand argentier luxembourgeois Jean-Claude Juncker. Et pour cause: la règle des votes à l'unanimité étant de mise à l'échelle européenne dans le domaine fiscal. La Belgique compte parmi les pays qui souhaitent étendre le champ d'application de la directive, entre autres aux produits d'assurances, et «renforcer la coopération fiscale chaque fois qu'il y a une affaire de fraude» - Didier Reynders. le ministre belge des Finances, a d'ailleurs confirmé hier que son pays passera avant 2011 au système de l'échange d'informations et renoncera donc à appliquer celui de la retenue à la source, qui protège le secret bancaire.

Mais la Belgique veut aussi replacer le débat dans un contexte plus large: celui de l'harmonisation fiscale (assiette sur l'impôt des sociétés, etc.), un sujet dont la Grande-Bretagne ne veut pas entendre parler. «Dès qu'on parle d'harmonisation, le champion de l'échange d'informations ferme la porte», persifle Didier Reynders. Jean-Claude Juncker a exprimé la même revendication, mais en ajoutant des conditions supplémentaires. Le Luxembourg refusera notamment de sacrifier son secret bancaire sur l'autel de la justice fiscale aussi longtemps que certains Etats non membres de l'UE, tels que la Suisse, conserveront le leur.

Conclusion d'un diplomate: «Le débat sur l'évasion fiscale est rouvert, dans l'Union. Mais on se demande déjà s'ils ne vaut pas mieux conserver quelques paradis fiscaux sous contrôle en Europe que de courir le risque d'une fuite massive des capitaux vers l'Asie?».